Les jours se suivent et se ressemblent tous. Du moins, c’était le cas pour Seth Carter. Il avait pris l’habitude, lorsque la place n’était pas trop bondée, d’aller écouter sa musique sur le bord de la piscine, au soleil, avec ses lunettes de soleil. Ça, c’était le gros de ses journées, à moins qu’il n’aille cours ou autres rencontres du genre. Mais là, Seth recherchait un peu plus, quelque chose pour briser la routine qu’il avait lui-même installé depuis son arrivée à la Teenagers Institute, un peu plus d’un mois auparavant. Déjà un mois qu’il était ici, en ces lieux. Malgré l’ambiance de prison qu’il ressentait toujours lorsqu’il se réveillait le matin et remarquais les autres lits et les autres personnes qui partageaient son dortoir, il avait réussis à reprendre contenance. Carter n’était plus aussi intimidé qu’à sa première journée. Il avait même réussis à se faire de nouveaux «amis», appelons-les des « connaissances amicales ». Il avait évolué depuis son arrivée dans ce centre. Il n’était plus aussi friand des moments de solitudes et de garder les autres à distance. Seth avait compris que pour survivre à ses quatre années à la Teenagers Institute, il devait avoir des amis.

Il y en avait deux à date qu’il pouvait considérer comme des amis. Il y avait Karmina, oui, oui, celle-là même qui avait faillis lui casser le nez dès la première journée. Même si elle était convaincue qu’il était gay, Seth trouvait sa présence plaisante et il se faisait peu à peu à son humour et à sa façon d’être. Et puis il y avait Angela, la seule personne sur terre, qui n’était pas de sa famille ou une professionnelle, qui connaissait son sombre secret. Plus le temps avançait, plus le jeune homme se sentait attiré par elle. Il lui avait confié son histoire et ils se ressemblaient sur certains points…Elle lui avait dit vouloir l’aider et il avait accepté son aide et ça avait porté ses fruits car il ressentait moins son fardeau sur ses épaules. Il y avait trois autres garçons dans le dortoir avec les filles et lui. Il connaissait Kyllian pour l’avoir rencontré dans le salon, après le couvre-feu mais de là à le considérer comme étant un ami, il n’était pas cent pourcent certain. Disons qu’il n’était pas ami mais pas ennemi non-plus aux yeux de Seth. Pour sûr, il comptait deux amies au centre.

Quittant sa place habituelle, Seth décida de revenir à l’intérieur pour passer au dortoir. Il était agacer de ne rien faire et de rester assis sur une chaise longue. À force, il allait finir par entretenir un petit ventre. Non! Il devait bouger parce qu’il devait entretenir son corps! Un peu de sport ne lui ferait pas de mal, pas du tout. Il se rendit rapidement à son dortoir et passa une paire de shorts en jeans et une camisole à larges bretelles. Les shorts de jeans n’étaient pas l’idéal pour faire du sport mais dès qu’il aurait droit à sa prochaine sortie, il irait s’en acheter une paire faite spécialement pour le sport. Il garda son iPod sur lui décidant que si le gymnase était vide, il allait pouvoir écouter librement sa musique tout en s’entraînant. Il y arriva finalement, quelques minutes seulement après avoir quitté le dortoir numéro 8. Ils y avaient quelques résidents, environ trois ou quatre qui jouaient au basketball mais le Cardinal choisit de ne pas se joindre à eux. Il enfila plutôt ses écouteurs dans ses oreilles et lorsque la musique se mit à jouer, il commença à courir sur la largeur du terrain.

Ses pas frappaient le sol au rythme de la batterie et il gardait toujours le même tempo dans sa course. Finalement, les autres résidents quittèrent la grande pièce, laissant le ballon à même le sol, près du panier qu’ils avaient utilisé. L’occasion était trop belle de renoué avec le seul sport qu’il ait jamais pratiqué. Il retira sa camisole, demeurant torse nu, ses boxers blancs légèrement plus hauts que ses shorts de jeans et retira ses écouteurs de ses oreilles. Reed posa sa camisole sur le sol, et son iPod dessus, laissant sa musique continuer. Il était seul maintenant, la musique qu’il écoutait ne dérangerait personne. Il marcha finalement jusqu’au ballon à l’autre extrémité du terrain et l’attrapa d’une seule main. Il dribla quelques fois avant de faire un grand sprint à travers le terrain et de venir marquer, en sautant et laissant tomber le ballon dans le panier de corde. Le son du ballon contre le plancher et celui de la musique mélangés était un son qu’il adorait. Il se sentait tellement bien. C’était les deux choses au monde qui lui faisait autant de bien. Mais ce son camoufla les pas de la personne qui approchait dans le gymnase.

Il se donnait à fond, la sueur coulant sur son front où tombaient ses mèches écarlates. Jamais rien ne semblait l’atteindre lorsqu’il jouait au basketball. Seth était soulagé et heureux. Lorsqu’il était arrivé en ces lieux, il avait d’abord pensé que le gymnase n’était rien d’autre qu’une salle d’entraînement, rien de plus. Mais, lorsqu’il avait finalement réalisé qu’il s’agissait d’un véritable gymnase, il était heureux comme un enfant dans un magasin de bonbons. Il y était donc dans son élément, content de pouvoir renouer avec ce sport qu’il aimait tant. Il jouait donc seul, dans le grand gymnase de l’Institut, où les seuls bruits ambiants étaient le bruit du ballon contre le plancher, la musique qui se faisait fortement entendre et le souffle de Seth qui ne cessait de courir pour rattraper le ballon rond lorsqu’il frappait l’anneau métallique. Les chansons se succédaient, comme les minutes et Seth était dans sa bulle, à proprement parlé. Il n’avait jamais véritablement connu un moment de la sorte depuis qu’il était arrivé à la Teenagers Institute.

Le jeune homme était heureux mais ce n’était pas la première fois depuis qu’il était ici…Les souvenirs de ses deux moments avec Angela lui revinrent en mémoire et il rougit, tout sourire, avant de lancer le ballon de sa main droite et qu’il passe à travers le panier sans touché à l’anneau. Il eut un geste de victoire et alors qu’il allait reprendre le ballon, l’une de ses chansons favorites se mit en branle : I came, I saw, I conquered du groupe Woe, is Me (NOTE : le groupe n’en est plus un désormais). Il commença à dribler au rythme de la musique et chanta en même temps que le chanteur :

« Just when things got back to the regular pace, disaster showed its ugly face. So add that to the list of all the reasons why I hate this place, and when you hit the bottom you can tell me how failure tastes. I came, I saw, I conquered all. You're never gonna win, because I told you once you, son of a bitch, I'm the best there's ever been. Go ! »

Et sur le GO, il lança le ballon en se donnant un élan par l’arrière, laissant ses deux bras dans le même mouvement que lorsque le ballon avait quitté sa paume et c’est ainsi qu’il retomba sur ses pieds. Le ballon ne passa pas dans les filets et frappa de plein fouet le cadre métallique du panier, revenant dangereusement vers le visage percé du jeune Carter. Et lui, vif comme un chat, se pencha pour éviter le ballon, qui roula derrière lui. Il se retourna et entama la course pour aller chercher le ballon brun et noir. Mais lorsqu’il releva son regard de glace pour voir où était le ballon, il remarqua quelqu’un, près de la porte du gymnase. La raison pour laquelle il était là était inconnue de Reed. Il s’arrêta alors, à quelques mètres du jeune homme, qui ne semblait pas être très vieux étonnamment, et ramassa le ballon.

« Salut. »

C’était une salutation brève mais ce n’était pas dans la nature de Seth de se laisser aller à de longues présentations, on l’avait bien vu lorsqu’il était arrivé au dortoir huit. Sa première action avait été de se choisir un lit, de s’y étendre et de continuer d’écouter sa musique, avant de finalement se présenter, suite aux paroles des filles concernant son impolitesse d’écouter leur conversation sans leur avoir parlé. Il avait été bref envers ce jeune homme, certes, mais au moins il ne l’avait pas ignoré. C’était un bon début. Seth revint vers son iPod, en ferma la musique en la mettant sur le mode pause et se retourna vers le jeune homme.

« Une partie ça te plairait? Ou le basket c’pas ton truc? »

A chaque fois qu'il décollait sa tête du sol, Kyle ne pouvait s'empêcher de se demander ce qu'il fabriquait. Explication : il n'aimait pas particulièrement pratiquer la musculation brute. Pourtant, depuis une heure, il faisait le tour de son programme personnel : pompes, gainage, abdominaux, tractions, travail sur la détente... Une heure à se demander pourquoi il faisait ce qu'il était en train de faire. Qu'est-ce qu'il pouvait être compliqué, des fois.

Dans les faits, c'était très simple. N'ayant pas envie de faire ses devoirs et ne sachant pas quoi faire à la place, Kyle s'ennuyait. Inévitablement, cet ennui avait fini par l'énerver. Il avait alors décidé d'aller au gymnase, malgré l'interdiction du docteur, et de pratiquer quelque chose qui l'énervait tout autant. Mais qui, au moins, l'empêchait de réfléchir de trop. Sauf que, malgré le fait qu'il appréciait grandement de sentir ses muscles travailler, Kyle était obligé de se coltiner une bande de bretzels qui pensaient savoir jouer au basket. Après s'être pris trois ballons dans la figures pendant son gainage, il avait entreposé comme séparation tous les tapis de protection pour la gym au sol qu'il avait trouvés, et s'était installé derrière, invisible pour quiconque était sur le terrain.

Kyle souffla d'un air agacé et considéra qu'il allait arrêter les abdominaux. Ses côtes le faisaient encore souffrir bien que sa petite bagarre avec Brian et ses rottweilers date à présent de deux ou trois semaines. Normalement, elles s'étaient ressoudées correctement et pleinement opérationnelles. Les marques quant à elle, avaient disparu depuis un moment déjà. Il reprenait le sport tout doucement. Kyle aurait aimé faire un sport collectif pour le coup. Ou tout du moins avoir un adversaire. Faute de mieux, il passa aux étirements. Le résident était plutôt souple pour un garçon. Dès qu'il eut terminé, il s'allongea sur les tapis et laissa ses pensées errer. Il ne tarda pas à somnoler. La fatigue de ces derniers jours profitait de son relâchement musculaire pour récupérer son dû : plusieurs heures de sommeils, perdues à se torturer l'esprit et se plonger dans son passé. Une seule cause à cela : le visage divinement beau d'Angela. Il passait des heures à s'interroger sur les sentiments que provoquait en lui la jeune fille. Dès qu'il était avec elle, il avait l'impression que Joëlle était à ses côtés. Impossible pourtant. Son amie était morte depuis trois ans.

Soudainement, Kyle sursauta, tiré de sa torpeur par il ne savait pas trop quoi. Il mit quelque secondes à identifier l'origine de son trouble. Les bretzels ne jacassaient plus. Ils étaient partis. Ô joie. Mais de la musique avait remplacé leur désagréables babillages. Curieux, Kyle passa la tête par-dessus sa muraille. Carter, torse nu, ballon de basket à la main. Intéressant. Mais encore plus, le colocataire de Kyle n'était pas seul. Un autre résident se tenait à l'entrée du gymnase. Un parfait inconnu. Son visage aux traits asiatiques ne lui disait rien. Sûrement un nouveau, soupira mentalement Kyle.

Seth éteignit sa musique. A l'entente de la question, un sourire mutin se dessina sur les lèvres du petit délinquant. D'autant plus que Carter lui tournait le dos. Et toujours ce ballon dans sa main...

Vous a-t-on déjà parlé de la spécialité de Kyle ? C'est sans conteste le rugby, appliqué au quotidien. Qu'il serve à faucher un imbécile comme Brian, traverser plus rapidement une foule, résoudre un écart de taille vis-à-vis de Kyllian, ou, en l’occurrence... pour s'emparer d'un ballon. Bon, d'accord, ce n'était pas tout à fait vrai. Au début, Kyle avait bien pensé sauter sur le dos de son camarade pour lui offrir la frousse de sa vie, mais il ne s'estimait pas assez proche de Carter pour se permettre une chose pareil. Sauf que cette réflexion ne l'avait atteint qu'en plein vol, alors qu'il avait déjà pris son élan et décollé du sol en hurlant :

« BANZAAAAAAAAAAAAÏÏÏ !!! »

Dans le cas présent, Kyle réussit à s'emparer du ballon. Mais c'était sans compter l'atterrissage. Le petit délinquant s'écrasa au sol dans un bruit de fin du monde et continua de déraper sur le revêtement tandis que la balle rebondissait gaiement dans la direction opposée. Quand enfin il s'arrêta, près de dix mètres plus loin, et se redressa vivement, histoire de limiter le ridicule, sa peau était rouge vif et ses côtes pleuraient de protestation. Quel imbécile de s'être mis torse nu !

« Salut. »

Le ton du basketteur sans transpirer l'enthousiasme, ne pouvait pas non plus être qualifié d'agressif. Pourtant, Oscar se sentit bien petit face à lui. Sa taille n'entrait pas en compte, sa seule présence suffisait à impressionnait le jeune japonais. Instinctivement, il le déshabilla du regard des pieds à la tête. Cette attitude lui permettait de prendre la mesure du comportement de celui qui lui faisait face. Ensuite, ses parles grises se dérobèrent pour éviter d'entrer dans un jeu de provocation et détaillèrent minutieusement ses chaussures. Si seulement, il pouvait entrer en possession d'alcool. Cela l'aiderait à supporter la situation, à relever la tête et à affronter son adversaire. Au lieu de ça, il se recroquevillait dans sa coquille invisible tremblant. Oscar avait découvert les vertu de l'alcool lorsque son père l'avait inscrit, du jour au lendemain, dans un pensionnat, dans le but avoué de l'éloigner de la demeure familiale. Consommer de l'alcool s'était avérait un excellent moyen de supporter une situation qui le tuait à petit feu : la présence constante des autres étudiants, la promiscuité des corps, la honte, le dégout, ses sombres pensées, et ses cauchemars nocturnes. Finalement, de retour chez lui ce vice s'était accentué. L'inhibition suite à l'absorption de plusieurs verres de liqueur l'euphorisé.

Bien évidemment, le règlement de l'Institut stipulait noir sur blanc l'interdiction de posséder alcool et dogue. Pourtant, il devait bien exister un moyen de s'en procurer. Sobre, son inconscient était gouverné par ses angoisses ... par ses fantômes. Il sentait démuni et incapable. Par conséquent, il se barricadait derrière le mutisme et ne s'autorisait rien.

« Une partie ça te plairait? Ou le basket c’pas ton truc? »

Minute après minute, le japonais sentait le délinquant aux mèches rouges s'impatientait. A raison. Après tout, une question qui nécessitait simplement de répondre par l'affirmative ou la négative ne devait pas prendre autant de temps. Mais dés qu'il lui avait adresser la parole ses pensée s'étaient comme bloquées. Une sorte de système de défense mis en place sans qu'il ne s'en aperçut. Un mécanisme de sécurité psychique sur lequel, il n'avait pas de prise. Il se demanda si gardait le silence ne pousserait pas le sportif à retourner sur le terrain plutôt que de perdre du temps en sa compagnie. La méthode avait déjà fait ses preuves.

Les sens d'Oscar perçurent du mouvement derrière son interlocuteur. Présence masqué par ce dernier qui augmenta son malaise. Est-ce qu'il était au courant ? Son imagination s'emballa en mettant en scène plusieurs scénarios en l'espace de quelques secondes. Il se souvenait d'une situation similaire à l'école qu'il fréquentait avant d'être envoyé en Amérique. Et, il ne souhaitait pas qu'elle se réitère. Par réflexe, le blond exécuta un bond en arrière avant que jeune homme brun s'étala maladroitement devant lui. Ses perles grises constatèrent la peau nu du maladroit contre le sol rugueux du gymnase, il grimaça de douleur pour le brun. Finalement, Oscar dévisagea les deux garçons l'un après l'autre. De toute évidence celui qui se cachait dans un coin du gymnase désirait participer à une partie de basket. A trois cela devenait compliqué. Il saisit l'occasion pour se défiler.

- Je ... je préfère regarder.

Sans attendre de réponse, il s'éloigna rapidement vers le fond, en direction des gradins sur lesquels, il grimpa le plus haut possible, le plus loin des deux adolescents. Ses genoux osseux remontèrent contre sa poitrine. La passivité représentait encore le domaine dans lequel, il excellait.

Bon. Pour être totalement honnête, il aurait préféré continuer de jouer seul, espérant secrètement que le jeune homme qui l’épiait quelques secondes plus tôt refuse poliment la partie qu’il venait de lui proposer. Seth regarda plus attentivement le jeune garçon, ce nouveau résident, s’il ne se trompait pas. Il ne semblait pas bien vieux, peut-être quinze ou seize ans, tout au plus. Les cheveux courts, pâles, son corps était svelte, ses yeux trahissaient ses origines asiatiques. Il semblait au Cardinal que le jeune homme était petit. Le garçon ne pèserait pas plus lourd que le poids d’une plume, se disait-il. Il ne l’avait jamais aperçu auparavant. Seth Carter attendait encore la réponse de son vis-à-vis, patientant, le ballon callé contre sa hanche gauche, touchant légèrement à la peau de son ventre. Le froid de l’objet lui tira un léger frisson, facilement dissimulé par la température chaude de son corps, tout juste stoppé dans son exercice. Il haussa un sourcil interrogateur, se demandant pourquoi il ne lui répondait pas et pourquoi son regard était fixé derrière lui. L’intimidait-il? Seth était massif certes et avait un regard glacial et rude mais il ne voulait pas l’intimidé, il savait ce que c’était que d’être nouveau ici…

Seth entendit alors un cri et il devina qu’il provenait de ce que regardait le jeune homme aux cheveux blonds. Il demeura calme avant de voir s’étaler une tignasse brune devant lui, suivit du corps, sans chandail, d’un jeune homme qu’il connaissait. Kyle Wilder. L’un des occupants du dortoir huit. Seth soupira bruyamment, voyant son ballon roulé jusqu’à l’extrémité opposée du gymnase. Il croisa alors ses bras sur son torse musclé, regardant le Wilder qui venait de se relever. Son torse était rougeâtre, signe du frottement de la peau contre le plancher, sur une grande distance. Le jeune asiatique s’était reculé d’un bond lorsqu’il avait vu Kyle s’élancer et Seth le vit grimacer de douleur, sûrement était-il empathique envers le jeune homme aux cheveux bruns. Puis, le blondinet répliqua, après un temps assez long de réflexion, selon le jeune homme aux cheveux rouges, qu’il préférait regarder. Alors, haussant les épaules, s’adressant au blondinet, Seth répondit :

« Pas de problème, le jeune. »

Puis, se tournant vers son colocataire de dortoir, il ajouta :

« Toi, tu veux jouer? Ou tes côtes n’aimeraient pas le traitement que tu leur fais subir? »

Tournant les yeux vers le jeune sans prénom, Seth le vit aller s’asseoir dans les gradins, très haut et loin d’eux. Quelque chose titillait Reed lorsqu’il croisa les yeux gris du garçon. Il semblait cacher quelque chose. Mais bon, il n’en était en rien des oignons de Carter. Dans une poussée de ses puissantes jambes, il partit chercher son ballon, revenant vers Kyle Wilder en driblant tranquillement. À environ deux mètres de lui, il lui envoya le ballon en direction de la poitrine, dans l’espoir qu’il pense rapidement à l’attraper pour ne pas se faire couper le souffle. Puis, il lui lança, d’un air de défi :

« Une partie de trente points. Je te laisse commencer, comptes-toi chanceux. »

Il se pencha donc vers l’avant, relevant, de chaque côté de ses cuisses, ses shorts en tissu, positionner pour suivre son adversaire peu importe ce qu’il ferait en attaque pour le déborder.

(Pardon pour le temps que ça m'a prit, j'avais un manque d'inspiration :/ )

Aïe !

Putain de bordel de m*rde, il avait mal ! Kyle se maudit de tous les noms en se remettant debout. Ses côtes étaient bonnes à jeter, autant en prendre de nouvelles. Le petit délinquant sentait la douleur lancinante se rappeler à lui par intermittences. Selon lui, il n’y avait pas que ses os qui étaient fêlés. Vraiment, qu’est-ce qu’il était crétin ! Se laisser prendre à sa propre ignorance. En présence des rottweilers de Brian, ce dernier étant encore à l’infirmerie, il avait bien sûr fait comme si de rien n’était. Devant tout le monde, en fait. Hors de question de se montrer affaibli. Sauf qu’il l’était et avait fini par l’oublier. Crétin.

Seth devait trouver la scène totalement ridicule, du haut de sa taille de mastodonte. Toutefois, son colocataire ne semblait s’être totalement discrédité puisque qu’il lui proposa de jouer. Si Kyle avait été raisonnable, surtout si Kyle n’avait pas été Kyle, il aurait refusé. Toute personne sensée aurait refusé et serait allée consulter un médecin. Sauf qu’à ses oreilles, la voix du Cardinal sonnait clairement comme un défi.

« Laisse mes côtes, ça ne sert à rien d’essayer de me déstabiliser en jouant sur ce tableau. T'espérais quand même pas que je me défile, non ?! » répondit-il, légèrement sarcastique.

Sur ce, Carter partit récupérer la balle.

Mais... où était le nouveau ? Kyle balaya le gymnase du regard. L’asiatique s’était sauvé. Le petit délinquant le repéra en haut des gradins. Mais qu’est-ce qu’il foutait là-haut ? Etait-ce une mesure de sécurité ? Sans doute. Et complètement légitime après le spectacle que venait de lui offrir le petit délinquant. Mais Oscar devait s’estimer heureux de ne pas s’être fait accueillir plus... brutalement. Quoique la carcasse massive de Carter avait dû infiltrer l’hypothèse d’un passage à tabac en règle dans sa petite cervelle.

Tout pris à ses divagations mentales sur le compte de Carter, Kyle faillit ne pas voir le ballon qui lui arrivait pourtant droit dessus. Wilder sauvage détecté. Cible verrouillée. Impact dans 3... 2... 1... Ah ben non, quand même pas. Kyle eut le réflexe de lever les bras au dernier moment, empêchant le ballon meurtrier de se joindre à la démolition de ce qui lui restait de sa cage thoracique. Désolé, la balle, une autre fois. Pour le moment, il avait un défi à relever.

« Ouais, ouais... tu verras d'ici la fin du match qui laissera commencer l'autre, la prochaine fois... » marmonna-t-il, concentré.

Evidemment, Kyle ignorait tout du niveau de son adversaire dans cette discipline. Mais surtout, il se garda bien de lui dire qu'il n'avait qu'une connaissance approximative des règles. Dans son ancien établissement scolaire, les cours de basket avaient rapidement tourné au catch, voire en des séances "règlements de compte" ou des bastons collectives. Le pauvre ballon de basket avait été très rapidement délaissé (C'est pour ça qu'il avait attenté à sa vie l'instant d'avant ! Tout s'expliquait !), alors pour les règles... boarf, après tout, il n'y avait pas d'arbitre. Kyle respecterait les règles si ça pouvait pénaliser Carter, mais sinon... advienne que pourra du pauvre Cardinal ! Sans doute prendrait-il goût au rugby, qui sait...

Faisant fi du regard concentré de son adversaire, qui ne semblait pas quitter la balle, Kyle feinta sur la droite. Ce fut l'espace de deux dribles seulement. Puis effectuant un demi-tour sur lui-même, il bondit vers la gauche, de telle manière qu'il cherchait à progresser, son dos présenté à Carter, rempart entre le ballon et son adversaire. Il ne savait pas si par ce biais il allait s'écraser contre lui, réussir à passer, ou si au contraire l'autre allait avoir deviné sa tactique et déjouer son plan.

{A mon tour désolé pour le délai ... défaut d'organisation  }

Oscar se recroquevilla en constatant qu’on le cherchait du regard. Il n’était pas sûr de vouloir attirer l’attention de l’un ou l’autre jeune. Notamment, celle du brun qui semblait déborder d’énergie et prêt à en découdre. De plus, la carrure massive du méché rouge ne l’arrêtait pas une seconde. Il avait bien fait de s’éclipser avant d’être entraîner dans ce match. Au moins, installé dans les gradins, il ne risquait rien, normalement. Avec un peu de chance, il parviendrait à se faire oublier d’ici quelques minutes. Trop concentrer à élaborer des stratégies d’attaques ou à empêché l’adversaire d’atteindre son panier, sa présence s’effacerait naturellement de leurs esprit. Pendant ce temps, le jeune asiatique de quinze ans pouvait les regarder tranquillement dans son coin. Celui sorti de nulle part tandis qu’il échangeait avec Seth avait un jeu qui ne se bornait à aucune règle.

Le blond se souvenait avoir assisté à plusieurs matches auxquels participaient son frère. Et dans ses souvenirs, pas si lointain que cela, il ne se rappelait pas d’un jeu avec autant de contact. Manifestement, le brun ne respectait pas particulièrement les règles surtout celles qui le restreignait. En même temps, quelles règles y avait-il à respecter puisqu’il n’y avait aucun garant. Pas d’arbitre.

La vision de ce duel sportif improvisé entre les deux garçon, le ramena quelques années en arrière. Combien de fois, avait-il assisté à un match auquel participait l'équipe de son frère aîné. Un nombre incalculable. Le regarder évoluait sur le terrain le rendait encore plus admiratif. Enfant, il comparait toujours son frère à un héro, celui qui le faisait exister dans une maison dans laquelle on ignorait sa présence. Pendant de nombreuses années, Oscar avait tenté de devenir le jeune homme qu'était son aîné. Mais comment rivaliser avec cette personne aussi à l'aise sur un terrain de sport que le nez dans ses livres. Rien ne semblait lui poser de véritable difficulté. Bien sûr au basket son équipe ne gagnait pas systématiquement. Néanmoins, Keiko ne jugeait pas les défaites inutiles. Un jour après un match, le cadet des Kamogawa avait demandé à son frère s'il n'était pas déçu d'avoir perdu. Ce à quoi il avait répondu qu'une défaite était parfois plus bénéfique qu'une victoire si l'on prenait le temps d'y réfléchir. Il avait aussi ajouté que rien n'était noir ou blanc qu'en prenant le temps de comprendre, on parvenait à saisir le gris.

Le japonais réfléchissait souvent à ces paroles. Surtout ces dernières années. Pourtant, il ne parvenait pas au même niveau de sagesse. Son corps se ramassa un peu plus sur lui même et son front s'appuya sur ses mains. Ce n'aurait pas dû être lui, mais bien Keiko. Non pas dans cet institut, mais bien sur cette terre. Son existence à lui ne possédait aucun sens. Sauf celui d'apporter malheur. Il n'y avait qu'à voir comment il avait détruit sa famille. On ne retiendrait jamais rien d'autre que cela.

Le bruit aigu des semelles qui raclent contre le sol attirèrent son regard sur le terrain intérieur. Qu'avait fait ces deux types pour se retrouver enfermer ici ? Le corps témoignait de tellement peu de chose. Si, l'esprit et le corps était intimement liés comme le défendait certain spécialiste alors la beauté ne pouvait plus être comparer à la pureté et la perfection. En apparences, les deux sportifs semblait tout ce qu'il y avait de plus innocent. Pourtant, leur présence à l'institut repousser cette option. Finalement à qui pouvait-on se fier ? Sur quels critères devait-on se baser pour savoir si l'on pouvait ou non accorder sa confiance ?