Institut Teenagers.
9.00 a.m


Bah fallait s'y attendre.
Ils finiraient bien par l'attrapper.

C'était censé etre une bonne journée. Sacha s'était levé du bon pied et, ses colocataires étant dejà partis, il aurait pu faire tout le boucan qu'il désirait en se levant. L'adolescent s'étira longuement, avant de porter à ses lèvres un carré de chocolat, qu'il detacha de la tablette la plus proche, à svoir celle posée sur sa table de nuit. Premier geste du matin. Habitude compulsive. Il n'y pouvit rien, après tout... Les volets étaient dejà ouverts, et le soleil filtrant par les rideaux laissait entendre que la journée allait etre belle. Sacha finit par se lever, jetant un coup d'oeil au bordel habituel régnant dans la chambre. Les affaires de junkie de Anton étaient plus ou moins rangées, mais quelques objets trainaient encore à droite et à gauche. Vraiment, il ne faisait pas assez gaffe. Si jamais quelqu'un entrait dansla chambre, ils auraient étés grillés. Heloise, bien qu'étant un individu de sexe féminin, n'était pas mieux. Des vetements trainaient un peu partout, surtout sur son lit. Sacha restait le plus bordélique des trois... Au moins, il avait de dignes adversaires. Tout en s'approchant de la fentre, il vit qu'il s'était fait leurrer par le soleil. Il venait de neiger. Génial. Surtout qu'il suffisait de lancer un coup d'oeil à Sacha pour se rendre compte que l'adolescent n'était pas vraiment fan des batailles de boules de neige et autre bohnommes givrés. Il soupira, se trainant vers la salle de bains. Une douche rapide le remit sur pied. Au moins, il était à présent bien reveillé. Il revint ensuite sur ses pas, rejoignant la chambre. Il sortit de son armoire un jean gris légèrement usé au niveau des genoux, ainsi qu'un t-shirt noir à manches longues. Sacha ne prit pas la peine de prendre un manteau: il n'avait pas l'intention de sortir. Loin de là. Il s'habilla à la va-vite, arrangeant au passage ses trois colliers en métal, qu'il ne quittait jamais. Après quoi, il enfila le bas de ses jeans dans des bottes noires, qui avaient la particularité de lui faire gagner quelques centimètres. bon, il était pret. Et il avait la dalle. Après avoir glissé ses cigarettes dans une poche, il quitta la chambre, les mains enfouies dans les poches de son jean.


9.45 a.m

Il avait enfin rejoint la cantine. Il passa les plats en revue. Comme d'habitude, aucun n'avait l'air particulièrement appétissant. Mais bon, pour une fois que Sacha avait faim. Il posa sur son plateau quelques tranches de pain, du beaurre, une pomme saisie à tout hasard parmis les fruits ainsi qu'une tasse remplie de café jusqu'au bord. Oui, il crevait vraiment la dalle... Sacha se dirigea ensuite vers une table libre. A cette heure-ci, la plupart des internes avait dejà fini de manger. Les autres dormaient encore. Il n'avait pas entamé sa première tartine qu'une voix dans son dos le fit frémir.

"Sacha Butcher? Vous etes convoqué dans le bureau du Docteur Olland. Immédiatement."

La voix appuya bien sur le "immédiatement". Il se tourna brusquement pour faire face à une jeune femme qui devait avoir un peu plus que la vingtaine. Non mais, pour qui se prenait-elle celle-là? Et puis, c'était qui ce Olland? Sacha avait beau creuser dans sa mémoire, ce nom ne lui revenait pas. Il détourna bien vite le regard de la jeune femme, portant de nouveau son attention sur son petit déjeuner. Mais l'autre ne semblait pas avoir l'intention de le laisser en paix. Elle reprit, d'un tom impatient.

"Veuillez me suivre, s'il-vous-plait."

Non, il ne me plait pas.
Hahaha...

Sacha eut honte de son humour à la c**, et il était bien content d'avoir gardé cette dernière pensée pour lui. Bon, elle allait bien finir par lui laisser la paix? Il voulait juste manger. Portant une tranche de pain à ses lèvres, il répondit de sa voix la plus indifférente.

- Je bouffe.

Mais l'autre ne semblait pas prete à abandonner. Elle soupira, faisant un signe de la main. Sacha, trop pris par son petit-déjeuner, ne remarqua pas ce qu'elle était entrain de faire. Ce qui fit que, dix secondes plus tard, Sacha se débattait furieusement avec un surveillant bien plus costaud que lui. Son plateau était renversé sur le sol, et toutes les tetes étaient tournées vers lui. Voyant qu'il n'avait aucune chance de se libérer, le blond finit par abandonner, à bout de souffle. On le traina vers l'aile droite de l'institut, là ou se trouvent les... psys? Un sourire se dessina sur les lèvres de Sacha. Un psy, fallait le dire avant! Le blond était tellement occupé à contempler la bouffe qu'il avait à peine preté attention aux paroles de la femme. Il ne s'était pas rendu compte qu'elle lui proposait une alternative amusante. Sacha cessa de trainer des pieds. Il n'aimait pas vraiment se rendre chez les psys, mais... Il adorait s'amuser avec ces Freuds en puissance.


10.00 a.m

Sacha entra enfin dans le bureau du "Docteur Olland". Cette pièce était loin de ressembler au bureau d'un psychologue. Il observa longtemps les posters de jeux vidéos. Il s'attendait à un décor plus... austère. L'adolescent se souvenait très bien du bureau du docteur Ashford. Une bibliothèque, quelques tableaux dans des cadres élegamment taillés, des fauteuils rembourrés... Rien à voir, quoi. Néanmoins, Sacha se sentait plus à son aise dans cet environnement juvénile. Il aperçut d'ailleurs rapidement le psychologue, qu'il détailla longuement, sans se soucier d'avoir l'air impoli. La première chose qu'il remarqua fut la taille plutot impressionante de l'homme. Surtout s'il était comparé au pauvre mètre soixante-cinq de Sacha... Le psy devait bien mesurer... un mètre quatre-vingt dix. Si ce n'était plus. Sacha observa son nouveau joujou des pieds à la tete. Il allait pouvoir s'amuser un peu. Le surveillant le poussa à l'intérieur sans trop de manières, refermant la porte derrière le dos de Sacha.

L'adolescent soupira, une petite moue boudeuse sur le visage. Allait-il jouer le grand gamin ou le schizo? Il opta d'abord pour le premier, l'un n'excluant pas l'autre. Sacha resta planté devant la porte, ses doigts freles allant jouer avec ses colliers, dans un petit bruit métallique. Il saisit un pendentif, qu'il porta à ses lèvres, comme à son habitude. Après quoi, il s'approcha toujours en silence. De quelques pas seulement. Il se cessa pas de promener le pendentif argenté sur ses lèvres, pas meme lorsqu'il prit la parole. Plutot simpla comme approche. Mais, après tout, Sacha n'avait pas envie d'en dire plus. Pour l'instant...

- B'jour.

Sacha se souvint d'ou lui venait cette aversion pour les psys. Enfin, pouvait-on réellement parler d'aversion? Non... Malgré tout, l'adolescent aimait les mener par le bout du nez. Il était supérieur à la plupart des gens, il le savait. Non pas par son expérience, mais de par son intelligence. Peu de monde se serait douté qu'un gamin comme lui aurait eu été assez rusé pour berner les psychologues qui, d'habitude, connaissaient plutot bien leu métier. Mais s'il y avait quelque chose que Sacha ne supportait pas, c'était cette espèce de fausse compassion que la plupart des psys croyait devoir exprimer à leurs patients. Les sourires empathiques, les paroles de réconfort. La plupart du temps, Sacha en était convaincu, il ne s'agissait que d'hypocrisie pure et dure.

Ce "Mr.Olland" semblait pourtant s'éloigner du stéréotype du psychologue compatissant. Assis sur un coin du bureau au milieu de ses posters -qui auraient aussi bien pu appartenir à un adolescent-, il ressemblait à tout sauf à un psychologue. Ce qui, presque inconsciamment et malgré lui, fit gagner au docteur quelques points dans l'estime de Sacha. Enfin, "Estime" était un bien grand mot. "Sympathie" serait plus approprié.

Sacha fut sorti de ses pensées par la voix du psychologue. Il lui demandait comment est-ce qu'il devrait l'appeler. A Bude, son médecin l'appelait par son surnom, à la demande de Sacha. Ici, cela n'avait plus une grande importance. Il haussa les épaules, sans cesser de jouer avec ses trois colliers.

- C'est comme vous voudrez.

L'adolescent lui adressa un bref sourire. Amusé? Moqueur? Encourageant? Sacha lui-meme n'aurait su que penser de ce sourire. Son expression retrouva bien rapidement sa froideur habituelle. Sans doute le psy se serait rapidement rendu compte de cette indifférence apparente. De cette froideur à toute épreuve. Mais Sacha s'en fichait royalement. Qu'on le prenne donc pour un gamin dépourvu de sentiments. Après tout, c'est ce que la quasi totalité de ses connaissances devait penser de lui.

On l'invita à s'asseoire, ce que Sacha ne se fit pas répéter. Il s'assit dans un fauteuil plutot large, dans lequel le corps fin de l'adolescent semblait presque disparaitre. Il se tortilla un peu, bougeant dans tous les sens, avant de trouver enfin une position qu'il jugeait confortable. Légèrement de travers, ses jambes étaient croisées, alors que son buste était quasiment couché sur le bras droit du fauteuil rembourré. Son regard froid ne quittait pas le psychologue des yeux.

- J'imagine que vous n'ayez rien à manger...? Ces enfoirés ne m'ont meme pas laissé le temps de déjeuner . En meme temps vous auriez pu choisir un moment meilleur pour vot' consultation...

Ses lèvres se contractèrent légèrement en une petite grimace de désapprobation. Il marqua une pause, avant de briser de nouveau le silence.

- Bon... Vous voulez commencer par quoi? Et c'est quoi votre nom? Pas juste Olland, j'imagine. Au fait, je dois vraiment vous vouvoyer? C'est pas par manque de respect, hein, c'est juste pour savoir.

Voilà que Sacha se transformait en véritable moulin à parole. Fidèle à ses habitudes de gamin, il ne parvenait pas à rester immobile sur son fauteuil. Il ne cessait de jouer avec ses colliers, de croiser et décroiser ses jambes, ou encore d'enrouler des mèches de cheveux avec ses doigts. Son regard fut soudainement attiré par le dossier posé près du psychologue. Parfois, le docteur Ashford lui laissait lire quelques paragraphes de celui-ci. Mais jamais Sacha ne l'avait lu en entier. Il reprit à parler, avant meme que le pauvre psychologue ne puisse en placer une.

- C'est mon dossier, n'est-ce pas? Vous pourriez peut-etre m'en dire quelque chose. Je ne l'ai jamais lu en entier. Aparamment on n'a pas le droit de savoir ce que les psys écrivent sur nous. J'ai toujours pensé que c'était du grand n'importe quoi, mais bon.