"Yume, tu t'appeleras Yume."

Ce fut les premiers mots qu'elle entendit de la personne qui s'était assise près d'elle. A cet instant, Yume avait à peine 5 ans. 5 ans et la bouille pleine de sang...Enfin ce n'était pas son sang, mais plutôt celui de ses parents qui avaient giclé sur elle. Cette douce perle blanche avait été victime de l'horreur d'un fou. Il l'avait laissé en vie pour qu'elle "admire" son travail de "boucherie"... Mais n'était ce pas pire que la mort? Entendre le cri des parents, agonisant, mourant, entendre les lacérations, les petits rires qui s'échappaient de cette bête, oui pour elle, ce n'était plus un être humain, mais une bête voir pire. Et surtout, sentir le sang chaud qui venait peindre le visage, les habits de cette pauvre petite fille...La vie de ses parents partaient, elle le savait, mais elle ne voulait pas le voir de ses propres yeux...

Au bout de quelques heures, plus aucun bruit n'était présent. Et puis elle sentit dans son cou un souffle, un souffle répugnant qui lui chuchota à l'oreille :

"J'ai enfin fini mon art. Tu peux enfin le regarder. C'est unique...UNIQUE, tu m'entends ? Au revoir princesse, au revoir..."

Il lui enleva le bandeau qui était autour de ses yeux, détacha les liens qui la retenait à la chaise, et parti tel qui l'était venu: en coup de vent.

Elle fermait toujours les yeux, elle ne voulait pas les ouvrir, mais malgré cela, malgré tout, elle les ouvra... Une violente envie de vomir la saisit, elle se mit à pleurer comme jamais, des flots coulaient sur ses joues pâles et froides. Elle aurait aimé crier, hurler jusqu'à s'en bousiller la voix, mais aucun son ne sortit...Rien. Elle resta alors, sur sa chaise, elle était vivante, mais morte de l'intérieur...Ce n'était plus qu'une enveloppe corporelle, au fond, elle était vide...Il l'avait tué d'une autre façon...

Les minutes passèrent, et elle aperçut des clignotements venant de l'extèrieur. Elle reconnu ensuite la police, et les pompiers qui étaient rentrés dans sa maison. Des gens étaient autour d'elle, apparemment ils lui parlaient, mais aucun son ne parvenait à ses oreilles. Le temps paraissait s'arrêter, mais c'était elle qui était en état de choc. Elle fut installée par la suite, dans l'ambulance. Ses yeux étaient perdus dans le vide. C'est alors que cette femme arriva... Elle était d'une beauté incroyable, d'un visage fin, d'une peau douce comme une plume... Elle sortie du néant Yume rien qu'avec sa présence. Elle lui donna alors son nouveau prénom et nom : Yume (Rêve) Tsuki (Lune). Pour la situation son prénom était un peu ironique...Un rêve dans le cauchemar.

Les mois qui suivirent furent durs. Très durs. Elle avait été recueillit par cette étrange et magnifique femme du nom de Saya. Durant cette période, Yume ne dormait presque plus: les cauchemars emplissaient son esprit, se propageant comme un poison mortel. Toutes les nuits elle se réveillait en pleurs, toutes les nuits elle hurlait, criait de douleur intérieure, bien plus profonde que n'importe quelles plaies. Elle saignait sans cesse. Mais chaque nuit elle trouvait des bras qui l'enlaçaient. Elle sentait la chaleur d'un corps, elle percevait le doux souffle qui s'achevait sur son visage. Tout était silencieux, aucune parole ne s'échangeait, juste les gestes apaisants et protecteurs qu'effectuaient Saya. Dans toute cette noirceur, une faible lumière venait éclairer son enfer. C'était son rayon de soleil qui l'étreignait chaque matin et soir. Saya calmait les maux les plus douloureux de son petit ange...Même si, Yume savait qu'ils ne partiraient jamais, et qu'ils la hanteraient chaque jour, chaque nuit.

Durant quelques années, elle étudia à la maison. Elle n'était pas prête psychologiquement à faire un retour en société, voir la méchanceté de ces gosses s'abattre sur elle, cela aller être de trop. Alors elle restait toute la journée à la maison travaillant, se reposant... Ses journées se résumaient à ça. Elle découvrit aussi le dessin, la lecture, c'était pour elle un échappatoire à sa vie. Souvent elle s'installait près d'une fenêtre qui donnait sur un jardin d'enfant, et elle observait. Elle observait cette jeunesse insouciante. Ces rires qui avaient l'air si claires, si mélodieux. Ces sourires si joyeux. Ces yeux qui pétillaient d'ivresse. Mon dieu elle les enviait tellement. Elle avait oublié ce temps là, c'était comme un trou noir, et cet oubli la rendait folle, au point qu'elle les jalousait. Saya essayait de la pousser pour qu'elle y aille, mais elle ne bougeait pas de sa fenêtre. Elle continuait toujours et encore de scruter ces gamins, essayant de détecter un quelconque malheur, mais aucuns n'étaient présents. Il n'y avait donc qu'elle qui possédait un immense trou au coeur? De nombreux psychologues essayèrent de l'aider, mais sa tristesse, ses peurs, et tout ce qui la rongeait étaient trop profond pour qu'elle s'en sorte. Cependant elle aimait l'acharnement qu'ils mettaient pour elle, pour qu'elle se sente mieux... Elle savait que cela servait à quelque chose, et elle les remerciait dans un petit murmure.

A la période du collège, Saya l'inscrivit, il fallait qu'elle soit en contact avec d'autres personnes. Mais Yume était, comment dire, seule. Elle n'était pas très sociable, les gens la trouvait "bizarre". Mais ce n'était pas elle, c'était eux qui l'étaient. Eux et eux seuls ! Elle les détestait avec leur bonheur puant. A l'école, Yume était une bonne élève, de toute façon elle n'avait que ça à faire. Elle ne bavardait pas, ne lançait aucun mot futile dans la classe, ne regardait aucun garçon. Ah, parlons-en des garçons : elle ne supportait pas leur manière de draguer les filles, elle n'aimait pas leur mentalité (surtout au collège). Et ne parlons pas des filles qui gloussaient quand un garçon les frolait. Elle haïssait tout ce cinéma. Mais surtout elle se détestait elle même, parce qu'elle n'arrivait pas à retrouver la petite fille qu'elle était avant. Heureusement quand rentrant à la maison elle avait Saya, son trésor, le seul et l'unique. Rien qu'en rentrant, elle sentait son parfum, délicat et sucré, un vrai délice qui emplissait son coeur d'une touche de couleur. La haine tombait quand elle était avec, elle redevenait une petite fille sensible, aimante, et sage.

Elle arriva enfin au lycée (qui fut décisif dans sa vie). En effet, c'est lors de sa seconde année qu'elle la rencontra. C'était une journée comme les autres dans sa vie mêlant tristesse et solitude. Son regard était dans le vide, elle était plongées dans ses sombres pensées, lorsqu'elle fut dérangée par une nouvelle élève qui respirait la joie. Yume n'avait même pas entendu sa présentation, et se demanda pourquoi elle venait la voir. Elle comprit alors: il n'y avait qu'une place de libre et c'était à côté d'elle. Elle esquissa un bref sourire, et lui adressa d'une faible voix: Enchantée. Yume se souviendra toute sa vie de la réponse de la jeune fille du nom de Yuuki : "Merci, jolie demoiselle" tout cela étant accompagné évidemment avec un charmant sourire. Le "Jolie" percuta son esprit, depuis quand était-elle "jolie"? Depuis quand quelqu'un ne l'avait pas regardé de cette façon? "Depuis quand ?" Ses mots résonnaient dans sa tête, et les réponses étaient les mêmes: Jamais. C'était une première fois. Son coeur se mit à battre, ses joues devinrent pourpres. Quelles étaient ces sensations qui parcouraient son corps? Et puis pourquoi n'arrivait-elle pas à détacher son regard du sien? Pourquoi son sourire ne disparaissait pas comme avec les autres? Ses questions quant à elles, étaient sans réponses.

Les deux jeunes filles se retrouvèrent vite amies, les autres adolescents étaient tout aussi surpris que Yume, elle rigolait enfin. Ce n'était plus la fille insociable qui était là, mais une tout autre personne, elle accédait enfin a un autre monde: celui de la société. Elles passaient énormément de temps ensemble, venant soit chez l'une, soit chez l'autre. Et petit à petit, Yume voulait plus qu'une simple amitié, cela ne lui suffisait pas. Non, elle avait envie d'elle, de l'embrasser, de lui appartenir corps & âmes. Mais sa chère demoiselle aimait bien aller vers les garçons. Jalousie. Jalousie. Jalousie. Ce qu'elle ressentait se résumait à cela. Elle changea son style, se donnant un côté plus Androgyne, il faut dire que comme ça, elle avait assez de succès, elle voyait les regards, les petits gestes qui la frolaient, les petits sous entendus. Elle fut d'ailleurs étonnée, mais ce n'était pas les autres qu'elle voulait: Yuuki. Seulement Yuuki. Mais elle n'arrivait pas à lui dire, elle ne voulait pas la perdre.

Un soir, elles étaient allées à une soirée, où certains jeunes pouvaient enfin se lacher et boire comme des trous, ou coucher avec n'importe qui. Bref un lieu de débauche. Mais les gens pouvaient quand même passer une très bonne soirée. Sauf que ce soir là, Yume était allée chercher à boire à Yuuki. En y allant, elle avait vu deux mecs qui n'arrêtaient pas de manger des yeux sa princesse. Au moment, où elle se retourna pour prendre les verres, elle jeta un coup d'oeil à Yuuki : absente. Et aux deux gars qu'elle avait vu : Absents. Son coeur s'affola, ses yeux cherchaient à travers le monde, mais elle ne trouvait rien. *MERDE* . Elle se mit à courrir, bousculant des gens puis s'excusant à la suite dans l'action. Elle chercha dans toutes les pièces, partout rien. Rien. Rien. Et rien !! Les larmes lui montaient aux yeux, s'il lui arrivait quelque chose elle ne s'en pardonnerait jamais. Elle sortit de la maison, fit le tour. Et les trouva. La rage montait, ces salauds lui avait arraché son haut, et allé lui enlever le bas.

-Yumee aide moiiiii, je t'en prie... !

Elle pleurait de tout son long, elle avait peur, et les deux autres rigolaient comme deux cons. C'en était de trop. Elle fonça sur un, avec une vitesse incroyable, lui pris avec ses deux mains sa tête, la rabaissa puis lui donna un violent coup de genoux. Un crac retentit: Son nez venait d'être cassé. Il pissait le sang, par terre, comme un moins que rien. L'autre n'avait pas bougé d'un poil, toujours surpris par la violence de fille. Elle se mit à hurler: Cassez vouuuus ! Mais cassez vous PUTAIN ! Les deux partirent, leurs queus entre les jambes comme des chiens... La violence parcourait ses veines, son sang, affluant vers son cerveau. Si elle s'était retenue c'était bien parce que Yuuki était là. Sinon elle les aurait surement gravement blessé. Voir pire. (Elle remerciait en ce moment même d'avoir appris à se battre depuis toute petite avec contact). Elle s'approcha de Yuuki, les larmes coulants, elle l'enlaça fermement, et lui dit au creux de son oreille : "J'te protègerai d'eux..." . Et puis sans comprendre pourquoi, sa bouche se décala vers celle de Yuuki, elle frola ses lèvres doucement. Elle s'écarta, se rendant compte de ce qu'elle venait de faire. Yuuki la regarda avec des yeux écarquillés.

-Je...Je...suis désolée. J'vou...J'voulais pas faire ça. Je sais pas ce qui m'as prise. Excuse moi.
-Ramène moi chez moi, s'il te plait.

Le trajet fut silencieux, lourds en émotions de toute cette soirée. Yume faisait taper ses deux bagues qu'elle avait à l'index et au majeur en signe de stress. Pour arrêter ça, Yuuki lui prit sa main. Un grand boum au coeur la saisit. Elles stoppèrent leur marche.

-Ecoute Yume, je ne sais pas ce que je veux. C'est si soudain pour moi. Je sais juste que je t'aime énormément et quand je vois une fille te regarder de trop près, ça m'énerve. Mais si faut c'est juste de l'amit...

Elle ne pu finir sa phrase, que Yume l'embrassa de plein fouet. Sa princesse ne protesta pas et se laissa faire. Elles vécurent alors une belle histoire d'amour, et blablabla. Et comme tout, cela eu une fin: Les études les séparèrent. Au début elles pensaient qu'elles allaient tenir à distance, mais cela faisait beaucoup trop mal pour l'une et pour l'autre... En tout cas, grâce à Yuuki et Saya, elle avait retrouvé l'envie de vivre sa vie, de se battre. Pour elle s'était comme si elle gagnait des victoires contre son enfance, contre elle, contre le tueur. Elle s'épanouissait enfin en société, même si un gros poids pesait sur son coeur, et ne s'effacerait jamais.

Elle décida de poursuivre des études en psychologie. Elle voulait comprendre le pourquoi du comment. Etudier les hommes, savoir pourquoi certains avaient des pulsions meurtrières, sexuelles ou autres. Pourquoi ils aimaient blesser, torturer, violer, tuer? Quels étaient leurs motifs, leurs buts. Oui, tout ça elle voulait le savoir, car une question la hante depuis ses 5 ans, et elle veut trouver cette clef qui dévérouillera tout. Mais autre chose est incrustée dans son esprit comme un parasite: Son comportement, il se met quelques fois à changer, à devenir violent, agressif. Cette part d'ombre lui fait peur, la terrifie, elle veut se comprendre pour ne pas perdre pied et devenir quelqu'un qu'elle ne supporterait pas. Mais jamais cela se propuirait pensait-elle. Hm ne jamais dire "jamais"...