Tic. Tac.
Je n'entendais plus que ça.
Tic. Tac.
Une sensation de malaise. Un regard échangé avec cet homme à mes côtés. Un dernière regard sur l'objet.
Tic. Tac.
Et puis il eût cette sensation de peur. Le fait de savoir qu'on venait de faire de la m*rde.

Et puis c'était le blackout. Tout était noir. Ou bien tout était blanc. Tout était douloureux. Je n'entendais plus qu'un tambourinement chaotique et lent... Mon coeur. Mon coeur qui se tordait. Lente agonie. Comme la sensation de se sentir partir, alors que la seule chose qui nous liait encore à ce monde là... C'était la douleur. Et puis j'entends des cris. Des hurlements. J'entends la peur et les ordres. J'entends les bombardements, et les balles qui sifflent. J'entends les hommes sauter, et ramper. J'entends mon coeur s'éteindre.

Le monde devint blanc. Aveuglant. Ensuite ce ne fut que des couleurs mélangées. Et petit à petit je voyais. Ces corps brûlés qui se convulsaient à mes côtés. Ces cadavres. J'essayais de me redresser un peu plus, et puis l'onde électrique emplit de nouveau tout mon bras. Épaule blessée, chair brûlée.

Un haut le cœur.
Régurgitation.

Mais c'était le goût de sang qui emplissait ma gorge, et colorait mes lèvres.


Je me redressais soudainement dans mon lit. Le corps en sueur. Le coeur paniqué. Machinalement, je vins masser mon épaule tatouée pour calmer la douleur peut-être seulement psychologique, qui l'emplissait.

Je jetais les draps au pied de mon lit, et je filais dans l'autre pièce pour prendre une douche. Glacée. Me réveiller. Nettoyer mon corps et mon esprit de ces cauchemars, de cette douleur.

Il était une heure et demi du matin.

J'enfilais un jogging, des baskets, un sweat à capuche légèrement ample, suite à ma légère perte de poids. Je considérai un instant le paquet de cigarette de Ludovic, oublié sur mon bureau. L'idée fut tentante, mais ce n'était pas aujourd'hui que je commencerais à fumer. Je soupirai, et puis sortais dehors. Marcher. Prendre l'air. Cela me changerait les idées.

C'était presque le calme absolu. Il n'y avait que le bruissement du vent dans les arbres. Les oiseaux nocturnes qui chantaient de temps en temps. Et puis il eût ce bruit de mouvement d'eau. Sous le coup, je ne compris pas, et je ne m'en aperçu pas réellement. Ce ne fut que lorsque j'arrivais non loin de la piscine, en entendant de nouveau le même bruit semblable, que je pris le temps de m'arrêter.

Je soupirai, désespéré en voyant les vêtements d'une femme au bord de la piscine. Personnel ? Militaire ? Résident ? La question ne resta pas longtemps en suspens, lorsque la femme refit surface. A en jugée par la couleur de cheveux, j'aurais dis résidente. Une nouvelle en plus.

Pas qu'elle soit de grand intérêt pour retenir son nom, je l'avais juste vue il y a deux jours. Et par la chance la plus incroyable qu'il fut, elle me fut assignée. A savoir que chaque militaire ici présent avaient plusieurs résidents attribués, auxquels notre attention devaient être focalisés. Cela permettait un suivi plus sérieux, de voir une évolution certaine. J'étais comme son tuteur à l'intérieur de l'institut, mais ca, elle ne le savait pas encore. Non. C'est pourquoi, dans quelques heures j'aurais envoyé un surveillant la chercher pour notre première entrevue.

Karmina Lolth.
J'avais son dossier posé sur mon bureau, dans mes appartements avant son arrivée ici. Je dois avouer que je n'avais pas encore tout lu. La grande majorité. Je savais ) quoi m'attendre, j'avais cru le voir dans son dortoir. Mais je n'ai pas non plus envie de la jugée sur son passé. Sauf si c'était ce qu'elle voulait.

« Mademoiselle Lolth.
Que me vaut l'honneur de vous trouver hors de votre dortoir, à cette heure avancée de la nuit ? »

Et je te fixais.
Toi et ta chevelure étrange.

Ce qui aurait été vraiment bien avec ce petit bain de minuit fut qu’elle puisse mettre un peu de musique, mais il valait mieux ne pas déranger le silence. Faire trop de bruit, c’était des plans pour qu’elle se fasse repérer tout de suite. La jeune femme à la peau basanée n’avait pas vraiment envie de s’être mouillée pour moins d’une heure, alors c’était hors de question. De plus, ça faisait du bien le silence. Dans cet institut c’était rare qu’on y ait droit. Peu importe où on se trouvait, il y avait toujours du bruit, que ce soit des gens qui parlaient, d’autre qui criaient, bref, jamais moyen d’avoir la sainte paix. En plus la nuit chaude dans la piscine avec simplement le bruit de l’eau allant se heurter contre les bords, c’était bien. La jeune femme se laissa flotter un moment à la surface de l’eau et regarda le ciel. C’était beau et relaxant, mais aucun ciel n’était plus beau que celui du brésil, couché sur le toit de leur maison. Ce n’était pas tant le ciel en lui-même, mais l’endroit et les personnes qui y étaient. Ça lui manquait, c’était peut-être pour cette raison qu’elle était aussi irritable avec tout le monde depuis son arrivé. Elle avait toujours eu un sale caractère, surtout avec la gente masculine, mais jamais à ce point. Bref, ce n’était pas vraiment très grave selon elle, c’était des choses qui arrivaient. De plus, elle ne comptait pas rester ici durant toute son année de condamnation. Il n’y avait rien qui la retenait ici, elle devait simplement se trouver une voiture et prendre la route au moment venu. Maintenant c’était d’attendre ce moment. Ça allait surement être long, mais pour une fois dans sa vie elle allait devoir se montrer patiente, si c’était possible.

Après un moment de réflexion, la jeune femme replongea sous l’eau et nagea. Elle n’avait pas regardé l’heure, elle ne savait pas combien de temps cela faisait qu’elle était dans l’eau. Cela lui était plutôt égale, elle aurait surement pu y resté toute la nuit. L’eau était particulièrement bonne, en plus, c’était l’une des premières fois qu’elle sortait à l’extérieur des murs de cette bâtisse. L’ambiance des murs la laissait de glace, retrouver le ciel, l’air chaud et de l’eau faisait vraiment du bien. En plus du silence, quoi demander de mieux en cette nuit chaude. Il y avait une chose qu’elle aurait peut-être dû demander. C’était tout simplement que cela reste ainsi. Car si l’inaction de sa simple baignade lui faisait du bien, elle allait bientôt avoir de la compagnie et dieu savait qu’elle s’en serait passée. Si la jeune femme avait quelque problème avec la gente masculine à cause de là où elle avait toujours trainé, ce qui était pire, c’était tout ce qui était loi. Police, agent de sécurité, et dans ce cas précis, militaire. Peut-être qu’elle aurait dû apprendre à se la fermer et à dire oui monsieur, mais malheureusement ce n’était pas le cas. Alors quand la jeune femme immergea de l’eau, envoyant ses cheveux vers l’arrière en les lichant de ses mains, entendre son nom ne lui fit pas particulièrement plaisir. La voix ne lui revint pas. Ouais par moment elle se faisait appeler Lolth, mais ça c’était dans les rodéos et elle doutait qu’il y ait quelqu’un de ce milieu excepté elle. La jeune femme aux yeux rosés rouans se retourna alors vers la source de la voix.

Pas besoin de dire que la vue du militaire à la crinière rouge ne lui fit pas particulièrement plaisir, mais il avait une sale tête ce qui lui arracha un sourire. En tout cas, si elle prenait bien une petite nuit blanche, ce n’était visiblement pas le cas de tout le monde. Si ça n’avait pas été de la politesse de répondre quand on se fait poser une question peut-être que le militaire aurait pu s’éviter la réplique que la jeune femme lui lança en réponse. La jeune femme mis pied dans le fond de la piscine et se tint debout, l’eau ruisselant sur sa peau basanée et s’arrêtant à ses hanche.

"C’est surement un coup de chance, au nombre de scumbag qui voudraient me voir en bikini, you’re the lucky one !"

Dit-elle en allant passer ses pousses sous les ficelles de son haut de maillot s’attachant dans son coup, rien pour dévoiler quoi que ce soit, juste pour que le tout soit encore plus vulgaire en accompagnant son ton arrogant et moqueur. Elle sourit alors, sortant sa langue percée pour la déposé un moment sur sa lèvre supérieure. Elle se moquait ouvertement du militaire qui l’avait surpris en train de se baigner à l’extérieur des heures de … d’autorisations? Appelez ça comme vous voulez, mais ce n’était pas légal. La jeune femme laissa lâcha son maillot et plongea un moment pour se rapprocher du bord où le dit militaire était. Karmina ne se rendit pas jusqu’au bord, histoire de ne pas pouvoir se faire tirer de force, mais juste assez pour pouvoir le narguer encore plus.

"Aha tu comptais venir nager aussi ou simplement mater? Attention avec le clore ta crinière pourrait décolorer AHA!"

« C’est surement un coup de chance, au nombre de scumbag qui voudraient me voir en bikini, you’re the lucky one !
- Merveilleux.

Ton neutre, si ce n'est pas pour dire froid. Elle aurait pu me parler de ce qu'elle avait pu manger la veille au matin, j'aurais exprimé le même enthousiasme. Je la fixais, et la regardais faire, sans réagir. Sans exprimer la moindre chose sur mon visage, si ce n'est de la neutralité. C'était sûrement l'un de mes points fort : sang froid et calme, en temps normal. Je pouvais penser tout et n'importe quoi de cette gamine, je n'y voyais là qu'une jeune femme qui avait apprit - et qui savait - à se sortir de bien de situations grâce à ses atouts féminin. Tant mieux pour elle. Mais ce n'est pas cela, ce soir, qui la sauvera de son écart au règlement.

Qu'elle fasse du bonnet A ou Z, siliconnée ou pas, qu'elle soit grande ou laide, petite ou belle, je n'en avais absolument rien à battre. Pour rester poli, n'est-ce pas.

Je finis, néanmoins, par hausser un sourcil, en voyant son petit manège. Madame voulait jouer, visiblement. Eh bien jouons. Mais elle risquait d'être rapidement déçue...

« Aha tu comptais venir nager aussi ou simplement mater ? Attention avec le chlore ta crinière pourrait décolorer AHA ! »

Un léger sourire amusé finit par déformer mon visage neutre. Un léger sourire en coin. Que devrais-je dire des siens, n'est-ce pas... Mes cheveux, et cette couleur écarlate... C'était un petit quelque chose d'au final très important à mes yeux, et à ceux de ma soeur jumelle, médecin ici. Nous avions dis adieu à nos cheveux blonds, ensemble, et ce depuis des années. Jusqu'à quand ? Je n'en sais rien. Sûrement, lorsque je ne sentirai plus aucune rage en pensant à ma mère, à mon père. Peut-être, qui sait.

Le fait qu'elle s'était mise à me tutoyer était assez pénible, au fond. Le fait que ces gosses aient renoncé à toute forme de respect, quel qu'il soit, était affligeant. C'était sincèrement triste pour eux. Je décidai néanmoins de ne pas la reprendre sur la chose. Du moins, pas encore. Ils avaient beau me désespérer à un point inimaginable, tout comme je détestais par pur principe ce centre, je n'espérais tout de même pas me laisser battre sur les questions de respect.

Et au final, pour répondre à sa question...

« Ni l'un, ni l'autre, de base. De toute manière, ce n'est pas en restant dans l'eau que je vais pouvoir "mater" quelque chose. »

J'avançais d'un pas, penchant la tête un instant pour croiser son regard. Ou garder mon regard planté dans le sien... Tout dépendait de son degré d'insolence et de franchise dans son regard j'imagine. Et puis je regardais les alentours, par simple curiosité de voir si d'autres résidents avaient eût la bonne idée de sortir de leur dortoir. C'est ça quand il y a trop de nouveaux. Ils ne sont pas si discret. Alors que les anciens, ils font preuves de plus en plus de créativité pour filer. C'était un peu drôle au fond. Mais bon... J'arrivais peut-être à les comprendre, comme ce soir, mais je n'étais pas payé pour les laisser faire. Leur tendre la main, leur expliquer des choses, leur faire apprendre le respect, tout ça. Nous verrons bien.

« Me feriez-vous le plaisir de sortir de l'eau, afin que je puisse vous raccompagner à votre dortoir... ? Ou bien, restons nous ici, afin que je puisse me délecter de la vue de votre plastique se fatiguant dans l'eau ? »

Il y avait un brin d'ironie dans ma voix, juste de la provocation, au fond. Elle voulait jouer après tout. Mon regard se reposa sur elle, en attente d'une réponse, lui adressant un léger sourire amusé.

Au final, je n'aurais peut-être pas dis non contre un bon verre de whisky. Ou d'une clope.

Il devenait difficile de profiter de la vie et de l’instant présent avec tous ces éléments de frustration qui se bousculait les uns après les autres. C’était néanmoins des choses qui arrivaient dans la vie et il fallait savoir les gérer. Certes il y avait des personnes qui avaient plus de facilité de d’autre à surmonter ces évènements. La jeune femme n’était pas une personne flanchant sous la pression, si elle en avait été une, elle n’aurait pas été une très bonne coureuse. Hors, elle était une des meilleures. Tout le monde avait ses qualités et ses défauts, Karmina ne faisait pas exception à la règle. Elle n’était pas qu’un monstre, mais était loin d’être un ange. Ce qui, souvent, jouait en sa défaveur avec les sources d’autorité était son impatience palpable. Il était en général assez facile de voir quand elle perdait patience. Parfois ça arrivait plus rapidement que d’autre, plus violemment que d’autre, mais quand ça arrivait, on le voyait. Comment? C’était son regard, tout se passait dans ses yeux clair et particulier qui se ternissait et devenaient de plus en plus foncé. Ce n’était pas compliqué à discerné, mais encore fallait-il y prêter attention et la connaître.

Passant à la situation présente, il y avait de quoi la faire perdre patience, même si jusqu’à présent, elle avait abordé la situation avec de l’humour. Pas le meilleur c’était certain, mais elle avait grandis avec ce genre d’humour masculin et vulgaire. Ce n’était pas tant le fait qu’elle se servait de son corps pour avoir ce qu’elle voulait, en fait, c’était même tout le contraire. Ça n’avait jamais vraiment nuis, mais ce n’était jamais totalement volontaire. La jeune femme se rendait où elle voulait avec son caractère, son talent et parfois même ses point. Après tout cette jeune femme aux allures vulgaires n’était rien de moins qu’une jeune vierge toute innocente. Bon innocente c’était discutable, mais elle était loin de la cours des grands quand on parlait sexe. Elle connaissait le sujet, mais pas de manière pratique. Fière, la jeune femme à la peau basanée ne se serait jamais mise à genoux pour avoir quelque chose. Mais ce n’était pas toujours évident à deviner quand on avait que la vision extérieure à première vue. Le confondre était donc normal et tout à fait compréhensible. Dans l’immédiat néanmoins, le trait de caractère qui ressortait le plus commençait à céder sa place.

Quand le militaire se remis à jacasser la jeune femme s’arrêta un moment de nager et déposa le bout de ses pieds dans le fond de la piscine. Elle le regarda un moment sans trop rien dire où faire. Elle commençait à être tannée de le voir là. Ouais d’accord, elle était hors des heures de sortie, elle aurait dû être en train de dormir en ce moment, mais ce n’était pas comme si elle avait été prise en plein trafic de drogue ou d’alcool ou de n’importe quelle autre dégueulasserie de la sorte. Elle ne faisait que profiter de la piscine pendant qu’il n’y avait pas une tonne de plaie autour. Enfin, il n’y en avait pas plein, mais il y en avait une quand même. Il n’avait pas que chose d’autre à faire? D’autre c*nnards à aller emmerder? Non? Franchement, c’était d’un ridicule. La jeune femme haussa un sourcil à sa dernière réplique. Honnêtement, elle n’était pas certaine de comprendre et ne préférait pas. Sèchement elle répliqua alors au militaire

"Pourquoi tu ne dégage pas à la place? Vas fouiller les alentours pour trouver des dealers."

C’était loin d’être dis de manière poli et son ton moqueur avait été changé pour un ton beaucoup plus ferme et sec. Ce n’était pas une proposition qu’elle lui faisait. La jeune femme dans l’eau lui disait carrément de s’en aller voir ailleurs. Elle se fichait qu’il soit une source d’autorité ou de peu importe ici. Présentement ce qu’elle avait devant elle c’était un gars en survêtement qui la faisait chier. Et s’il ne dégageait pas rapidement, elle espérait qu’il savait nager, parce qu’elle allait lui faire passer un mauvais quart d’heure. S’il n’avait rien de mieux à faire que de faire chier une baigneuse, c’était triste. Ridiculisant le signe, elle lui fit un petit salut à la militaire en lançant.

"Repos soldat! Dégage maintenant."

Puis elle prit un petit élan pour recommencer à nager en direction opposé à l’homme à la chevelure rouge.

Neutre.
Calme.
Impassible.

A partir de cet instant présent, plus aucune émotion ne se lisait sur mon visage, pas même au creux de mes prunelles. J'avais su perfectionner ce calme olympien durant mes années - trop nombreuses d'après certaines personnes - de service militaire. Pas de pitié, pas de subjectivité. Pas de préférence, pas d'écart. C'était du moins, à quoi j'avais voué ma vie entière : notre Nation. Notre patrie. Je l'avais installée en première ligne de ma vie. Ma famille venant tout juste après. J'ai obéis, j'ai agis, j'ai tué pour protéger ce pays. Pour protéger ces familles qui sont loin des manipulations politiques, des magouilles militaires, loin de ces carnages muets... Jamais elles ne sauront qui nous sommes, et ce que nous avons pu faire pour eux, pour nos fils. Ces mêmes gosses qui se retrouvent enfermés ici. Moi avec...

J'eûs comme un goût amer dans la bouche, à cette pensée. Toujours cette même rage qui faisait atrocement mal : comme un couteau que l'on ne cessait de tourner dans ma chair... Lentement. Avec un plaisir morbide que de laisser mon sang chaud ruisseler contre ma peau. C'était malsain. Ma carrière s'était brisé. Car réfléchir c'est désobéir, finalement.

Demoiselle qui nage.

Et j'avais finis par réellement désobéir. Entraînant mes hommes avec moi. J'ai conduit les trois-quart à la mort. Super. Alors qu'étais-je censé faire ce soir ? Sagement obéir ? Ramener cette insolente dans son dortoir ? Oui. Alors peut-être fallait-il que je l’assomme au préalable, pour la porter jusqu'à son dortoir. Je détestais me répéter. Je détestais que l'on me crache dessus.
J'étais un homme d'action, incapable de pourrir dans un bureau. Mais je ne mettrai jamais la réflexion de côté, bien au contraire.  Chez nous, l'intimidation est souvent présente. C'était notre manière d'imposer notre autorité au début. Fallait que l'on pose nos couilles sur la table, expression totalement machiste. Mais c'était ce qui reflétait le plus la réalité. Ici, non. Fallait réussir à s'asseoir sur de l'autorité non affirmée, sans les intimider plus qu'il ne le fallait... Sinon ils pourraient hurler à la violence. Tellement triste.

Lolth ne nage plus.

Je la fixe. Je n'ai toujours pas dis un mot. Ni même exprimé une émotion.

Et puis je bougeais un peu. Je m'éloignais d'elle, pour m'approcher de ses vêtements. Je les ramassais pour les poser sur l'un des transats. Je glissais mes mains dans mes poches, et vint fouler l'herbe sur quelques pas. Dos à la piscine, mon regard se perdit dans le ciel dénué d'étoile.

Ils avaient prévue de la pluie pour cette nuit. Espérons que nous soyons rentrés avant.

Et puis je finis par revenir vers la piscine, toujours aussi silencieux et peu avenant. Je savais que j'étais agaçant. Mais quitte à ce que je l'agace, autant qu'elle s'énerve réellement et me montre de quoi elle était capable.

Elle devait être en colère. C'était compréhensible. Enfermée ici, pour avoir commis des conneries. Séparées de son train-train rassurant qu'était sa vie. Coupée de sa famille. Dieu seul savait dans combien de temps elle pourrait les revoir ! Les visites des familles n'étaient accordées généralement qu'à quelques fêtes religieuses. En particulier Noël. Les autres, cela dépendaient du comportement du résident.

Seule, dans un nouvel univers.
Seule contre tous.
Pas de téléphone, pas son lit, pas sa chambre, pas sa famille, pas ses amis, pas sa liberté.
Et bientôt un uniforme.

Alors je fini par parler. Calme. Cherchant juste à la raisonner.
Je ne la forçais pas, j'en appelais à sa maturité. Elle n'était plus une enfant. Ils avaient tous été, pour la majorité des enfants qui ont grandis trop vite. Alors elle comprendrait... Sûrement.

« Tu devrais penser à ce que tu as perdu en arrivant ici... Et voir si ca vaut le coup de te foutre dans la m*rde, pour si peu. »

Si peu. C'est-à-dire revenir dans son lit. Au chaud. En sécurité. Car ici, ils l'étaient davantage que dans une prison. Elle aurait sûrement partagé sa cellule avec des adultes. Un homme, deux, trois. Ils auraient été probablement été trois à la maintenir pour la violer. Et tous les autres à acclamer, jusqu'à ce que les gardes comprennent, et viennent. Mais il aurait été sûrement trop tard.

Alors mon regard se plongea de nouveaux dans ses jolis yeux...

Refuser de revenir dans son dortoir, par pure fierté... Et voir son séjour ici s'allonger. Les conditions s’aggraver...

Non, décidément, je n'arrivais pas à voir une pareille sottise dans les yeux sombres de Karmina.

Plusieurs qualités pouvaient être utilisées pour décrire la jeune femme à la peau basanée. Sans aucun doute, elle était intelligente et brillante, elle était fière et digne et bon il était possible d’en sortir beaucoup d’autre. Néanmoins il y avait bien une qualité qui n’avait jamais fait partie de cette liste. Elle n’en ferait probablement jamais partie d’ailleurs et c’était la patience. Certes elle pouvait être tolérante envers certaines choses, mais en général, non elle était totalement impatiente et quand on l’énervait, elle ne supportait pas bien longtemps. Il y avait bien des choses qu’elle cachait bien et qu’elle ne laissait pas paraitre, mais attention quand on l’énervait ce n’était jamais très long avant qu’on le sache. En général elle avait le talent de se faire comprendre assez facilement, elle ne faisait pas dans la dentelle, malgré la majorité de ses sous-vêtements dans ce dit tissus. La jeune femme était très claire et précise quand quelqu’un l’énervait, que ce soit dans son langage verbal ou corporel, rien ne vous laissait sous-entendre que peut-être continuer de l’embêter était une bonne idée. C’était une des nombreuses choses qui la détaillait. Elle avait beaucoup de qualité, mais également de nombreux défauts. Elle était loin d’être parfaite. La jeune femme le savait très bien néanmoins, elle tentait comme possible de travailler sur certains points de sa personnalité qui était plus déficient que d’autre, mais elle ne pouvait pas régler ces aspects d’elle-même du jour au lendemain. Ça demandait du travail et de la pratique. Et puis travailler sur la patience ce n’était la chose la plus facile à faire non plus.

Alors ce militaire qui se faisait aller depuis tout à l’heure ne faisait pas que commencer à lui tomber sur les nerfs. Dire qu’il les piétinait depuis un bon moment déjà était plus réaliste. Après avoir nagé un moment, elle n’avait pas remarqué sur le coup qu’il avait touché à ses affaires. C’était des histoires pour qu’elle sorte d’un coup de l’eau et aille lui dire sa manière de penser sur le champ. Heureusement ou malheureusement pour l’homme à la chevelure rouge, elle ne s’en rendit compte que lorsqu’il déposa ses vêtements plus loin. La jeune femme arrêta de nager et le toisa sévèrement. Elle pouvait également aborder un air sévère, qui avait un uniforme et un béret aurait pu être particulièrement crédible. Néanmoins, en maillot de bain elle n’avait l’air que de la délinquante qu’elle était. Son mouvement d’essuyer ses mains dans l’herbe fut la goutte d’eau qui fit déborder le vase. S’il était parti, il aurait pu s’en sauvé, mais à son plus grand déplaisir, ou plaisir rendu là, il insista encore. La jeune femme le regarda un moment en silence et puis soupira longuement. Elle se mise alors à nager pour atteindre le bord de la piscine et s’y hisser d’un mouvement, sortant son corps mouillé de l’eau près du militaire. Elle se releva et le regarda un moment avant de concéder.

"…Ce n’est pas totalement faux."

Karmina marcha alors vers le soldat et s’arrêta près de lui relevant son regard rouan rosé vers celui vers de l’homme. Du bout de ses doigts mouillés elle alla dans un mouvement particulièrement doux les déposer sur son torse les faisant danser comme s’il s’agissait de note de piano. La jeune femme esquissa un petit sourire timide et souffla.

"Pour si peu, ce serait du gâchi."

Ce après quoi, elle le poussa sans aucune retenue, à la limite violement, dans la piscine. L’avantage d’en sortir, une peau mouillée à beaucoup moins de grip, ça glisse, c’était dommage. La jeune femme recula en le regardant tomber à l’eau en soufflant un « tch fuckbag » irrité, mais clairement satisfait. Karmina tourna ensuite les talons pour se diriger vers ses vêtements qui avaient été déplacé. Elle tordit sa tignasse en chemin et arrivé à ses vêtements, elle retira son maillot pour le torde et s’empresser d’enfiler sa camisole et ses shorts pour couvrir sa nudité temporaire. Après avoir ramasser ses effets personnels, elle se retourna vers la piscine pour prendre connaissance de l’état du militaire.

La colère n'est pas un argument. Le calme est la tenaille du bourreau.
Reste calme. Oui. Restons calme.

Parce que j'ai beau eût serrés mes doigts autour de son poignet, lorsque j'ai vu son intention passer au creux de ses prunelles, avant même qu'elle ne me pousse, cette petite c****... Sortait de l'eau ! Elle glissait ! J'aurais pu aggriper de l'air, cela aurait fait le même effet. Le contact de l'eau fut violent et froid. Et mes vêtements se gorgèrent d'eau, tout comme mes cheveux, avec une rapidité toujours aussi déplaisante dans ce genre de situation. Qu'est-ce que je fais ? Je lui fou ma main dans sa gueule de peste à la c**, je l'explose contre un mur, ou je garde le contrôle ? Parce que là, ce contrôle de m*rde, il va juste se retourner contre elle, et elle va rien comprendre cette petite c**** qui se croit plus maligne que les autres !

C'était dingue d'être âgé et être incapable d'utiliser ce que l'on nommait "cerveau" encore aujourd'hui. Elle était idiote comme ses pieds ou quoi ? Ok, tant mieux, mademoiselle était énervée et venait de me foutre à l'eau. Super. Mais qu'elle ne vienne pas me pleurer dessus lorsqu'elle verra qu'elle n'aura pas d'autorisation de sortie jusqu'à ce que JE désire la lui ré-accorder. Ou qu'elle ne puisse pas voir sa famille, jusqu'à nouvel ordre. Cela ne serait que moi, je la chapônnerai un moment, mais loin d'ici, juste pour la voir suer et pleurer car elle n'en pouvait plus de marcher, de courir, d'essayer de sauver sa peau. Me supplier de rentrer dans ce centre de m*rde, qui au final n'est qu'un merdier de paradis pour eux ! Eux qui ne connaissent pas ce que veut dire "respect", ou encore "règlement", ou devrais-je dire "loi". L'anarchie ! Oui, VIVE L'ANARCHIE ! Et ils crèveront eux même avec ces idéaux à la c** qui ont déjà fait leur preuve auparavant. Il y en aura toujours pour profiter de ce système.

Reste calme. Oui, restons calme.

Je vins glisser ma main dans mes cheveux pour renverser mes mèches écarlates en arrière. Je respirais lentement mais profondément. Saloperie. Elle aurait été ma fille, je crois que je l'aurais gifflé, là, tout de suite. Mais il serait malheureux que je me fasse virer, privé d'une retraite pour violence sur mineur encadré. Ou alors si, faisons-ca, cela sera tellement plus drôle ! Mais je préfèrerai tout de même finir ma vie où bon me semble, qu'à l'intérieur d'une cellule. Elle profitait de ce constat, de notre interdiction à leur lever la main dessus. Parfois, je crois que j'en prendrai un malin plaisir, si ils sont tous aussi c** et simple d'esprit qu'elle.

Je sortais de l'eau, sans un mot, si ce n'est que j'abandonnais mes baskets au sol. Ma mâchoire était crispée, sûrement seule preuve - avec les lueurs assassines dans mes yeux - qu'un mot de plus et j'allais vraiment devenir méchant. C'était sûrement dans ces moments là, de pure colère froide que l'on cessait de m'ennuyer. J'étais plus qu'intimidant, je paraissais dangeureux. Et seul ma conscience, et mes pensées pourraient m'arrêter.
Je vins prévenir via mon bippeur l'un des gardes de nuit, par une seule action de bouton, de la présence d'un résident aussi.
Je ne retirerais pas mes vêtements, mais je la fixais longuement, sans bouger. Comme prêt à l'attraper si elle bougeait. Ce ne fut que lorsque le garde de nuit arriva, que j'ouvrais la bouche. Un ton froid. Amer.

« Tu te tais. Et tu retournes dans ton dortoir. Tout de suite. »

Après un signe de tête, et un remerciement silencieux, je laissai partir Mademoiselle Lolth, ma petite peste attitrée, avec le gardien de nuit. Je soupirai, et ce ne fut que lorsque je les vis entrer à l'intérieur de la résidence, que je retirai mon haut pour le tordre un peu.

Et je filais dans mon bureau.


» Sujet Terminé.
Suite : Ma prison est la tienne aussi.