Oscar errait lorsqu'il aperçut la piscine construite à l'extérieure. La présence d'un tel endroit le surprenait. D'autant que le carrelage supportait des chaises longues. Cela dénotait tellement du contexte. Le japonais se délesta de ses chaussures et ses chaussettes afin de parcourir le sol froid et impeccable. L'odeur de chlore agressa ses narines et réactiva sa mémoire par association d'idée. Foule. Applaudissement. Le bruit d'une masse qui rencontre la surface de l'eau. Cris. Musique. Ces souvenirs remontait à tant d'années et si peu à la fois.
Après un temps d'hésitation, il se baissa pour relever son pantalon jusqu'à ses genoux puis s'installa sur le bord de la piscine un pied dans l'eau, son autre jambe remontant contre sa poitrine. Il entoura cette dernière de ses bras maigrelets et posa sa tête sur son genoux osseux. Cela datait de plusieurs années la dernière fois que l'adolescent avait fréquenté une piscine, tant de chose lui déplaisait. L'odeur aseptisée d'une eau qui ne s'anime qu'au contact d'un corps. Un réservoir superficiel au fond et aux murs imberbe. Un espace vide de vie à moins qu'un tiers en décide autrement. Et les obligations qui conditionnaient cette rencontre : pieds nus, un maillot de bain, interdiction de courir, se douchez avant de se baigner, ... Cet endroit, vaste et confortablement aménagé, l'incommodait.
Mais, son île natale lui manquait. La mer encore plus ! La nostalgie envahissait ses pensées. A l'institut tout lui était étranger : le pays, la culture, le climat, les autres pensionnaires, le personnel, le contexte, seule la langue ne lui échappait pas - ou du moins pas totalement -. Inconsciemment, sa jambe exerçait des mouvements circulaires dans l'eau provoquant de légères vagues. Des larmes mouillèrent ses yeux. Cette vie qui lui appartenait de moins en moins l'usait. Fallait-il être un automate pour pouvoir prétendre à mener la barque de sa propre existence ? Pourtant, la mer ne devait rien envier à cette piscine paisible, souscrivant à une hygiène irréprochable, et protéger par un règlement stricte.
Les raisons qui le poussèrent à se lever pour s'éloigner vers le sentier qui achevait sa course devant le portail, empoigner une pierre le délimitant, pour finalement la lâcher au-dessus de l'eau limpide, il n'en savait strictement rien. Une envie ? Un besoin ? Un délire ? Une rébellion ? La réponse dépendait toujours de celui qui jugeait.
La pierre coula au fond du bassin brisant le relief linéaire des lieux et colorant légèrement l'eau de terre en un endroit. Campé sur ses pieds, le dernier arrivé observait la scène impassible.