Sur tout le chemin, je n'avais pas réfléchis, je ne m'étais pas posé de questions. Je regardai le ciel de temps à autre, ne répondais pas à ma mère et tenais la main de ma petite sœur. Elle venait d'avoir quatre ans. Ses longues boucles blondes tombaient sur l'ours en peluche que je lui avais offert l'autre jour, tandis qu'elle me regardait de ses grands yeux. C'était la seule chose physique que nous avions en commun. Elle avait mis ses habits du dimanche et continuait de m'observer. Je faisais comme si je n'avais rien remarqué. Je lâchais de longs soupirs, roulais des yeux. Je faisais tout ce que je pouvais pour la faire rire, bien qu'elle semblait très concentrée.
En allant dans cet établissement, j'effaçais mes fautes. J'oubliai mon passé.
Je ne voulais pas savoir comment seraient les gens là-bas, comment serait la discipline. Dure, sûrement. Assez pour être l'endroit où tous les jeunes délinquants et autres viendraient expier leurs péchés, si l'on peut dire.
Puis d'un coup, ma mère à freiné. Nous étions arrivés.
Elle avait les mains crispées sur le volant, prête à faire demi-tour en trombe.
J'avais tout l'amour qu'il me fallait dans cette voiture. Mais pas chez moi. Pas avec mon père.
Il n'avait même pas tenu à nous accompagner jusqu'au pensionnat, et ne m'avait pas dit au revoir. J'étais un monstre à ses yeux. Dès le jour où je suis partie avec Lili Rose.
Personne ne m'a dit ce qu'il s'est passé durant mon absence.
Je n'avais pas cherché à savoir.
Ma mère était une de ces femmes qui s'habillaient et se maquillaient pour d'autres que leur mari. Ses cheveux étaient du même blond ivoire que ceux de ma petite soeur et ses yeux, plus simples, étaient d'un bleu océan. Elle avait peint ses lèvres de rouge et limé ses ongles. Elle avait mis du mascara mais le regretta vite.
J'avais vraiment l'impression d'avoir tout ce qu'il me fallait. Une mère et une petite sœur qui m'aimaient, un père dont on pouvait se passer, une vie plutôt aisée. Puis tout cela avait basculé, en partie à cause de ma phrase. Mon "parce qu'on a qu'une seule vie", mes actes qui ont causé bien trop de mal.
Mais là c'était autre chose. Si je n'allais pas dans cet établissement, ce serait l'Etat qui m'empêcherait de faire ce que je veux de ma vie. Ce serait quelque chose qui me dépassera totalement. Et je voulais continué à être libre.
En bref, j'ouvrirai cette portière et j'irai me confronter à mes actes.
J'écourtai les étreintes et les embrassades en leur promettant de leur écrire et leur téléphoner. Je pris rapidement mes deux valises, leur fis un signe autant que je pouvais avant de les regarder partir.
Je dois avouer être plutôt flippé, en poussant la porte de ce grand établissement, mais ça ne pouvait pas être pire qu'avant, si?