Johnattan, lui, s’était levé d’excellente humeur à 5h3O du matin. Il n’avait pas revu Kyllian depuis bien longtemps, le restaurant d’hier avec ses amis était très agréable et en plus, le comble du comble, il avait foutu Aby dans une m*rde pas possible. En bref, la journée parfaite. Et en se levant, il se dit avec bonheur qu’elle allait sûrement débarquer dans son bureau, furieuse, car ayant reçu un certain mot d’Allister. Et c’était lui, Johnattan, qui lui avait suggéré une punition un peu plus dure pour apprendre à « cette jeune insolente » à se tenir. Surtout que la bagarre, pour une fille, ce n’était pas bien distingué. Explications du point de vue de John. Il avait été ameuté par des cris incessants. Pendant quelques minutes, il s’était dit que c’était des élèves qui s’amusaient avec un quelconque jeu vidéo dans la salle de repos. Mais bien vite, quand il avait entendu des bruits de bagarre, il était allé voir. Et peut-être n’a-t-il pas été si surpris de voir Aby, sa peste favorite, en train de tabasser un blondinet. Pas moyen de dire qu’elle se battait car le pauvre n’arrivait même pas à en placer une, à proprement parler. En voyant ce gosse au visage défoncé, qu’avait-il fait, en premier lieu ? Il avait sourit. Imperceptiblement, mais un sourire quand même. En jetant un coup d’œil vers Aby, qu’il tenait fermement par le bras, elle avait les poings sur les hanches et admirait fièrement son chef-d’œuvre. Bon, c’était vrai que ça avait quelque chose de beau… Mais là, si le gosse crevait, ça serait sa faute. Alors, d’une voix autoritaire - et avouons que ses presque deux mètres aidaient aussi - il désigna quelqu’un pour l’emmener à l’infirmerie et dispersa la foule. Aby fut dans son bureau trois minutes après. C’était quand même la troisième fois en deux semaines et il commençait à en avoir ras le bol de devoir toujours la gronder lui-même. Que faisaient les autres, nom d’un chien ? A ses excuses, il haussa un sourcil. Cette petite miette la traitait, elle - l’imposante et effrayante Aby - de salope ? Sorry dear, mais je n’y crois pas un instant. Il l’avait laissé partir, excédé, à condition qu’elle aille s’excuser.

Il savait pertinemment qu’avec elle, le verbe s’excuser n’avait aucun sens. C’est pourquoi il était quand même aller voir le Sous-Directeur avec la ferme intention de la faire punir. Ça allait être drôle. Il était reparti à son bureau, satisfait de la réponse d’Allister. Et maintenant à 6h59 du matin, il l’attendait, sachant qu’elle n’allait pas tarder. Pas du genre à réfléchir avant de foncer, elle, quitte à s’emplâtrer dans le mur. Et il savait qu’elle n’attendrait pas demain pour venir. Néanmoins, cela ne l’avait pas empêché d’être plongé dans la rédaction d’un dossier à la main, s’il vous plait, en l’attendant. Il n’avait pas de rendez-vous avant quatorze heures - la belle vie. La pochette rouge qui lui servait d’appui-main était calée sur ses genoux croisés et contre le rebord du bureau, écrivant tout en guettant son Mac allumé. Il attendait un mail très important de sa mère pour savoir si oui ou non, il pouvait faire ce voyage en France l’été prochain. N’ayant pas d’adresse fixe, il avait donné celle de ses parents et sa mère lui retransmettait tout par mail. Et ce voyage était capital. En réalité, c’était juste un meeting entre amis du lycée. Mais il avait tellement envie d’y aller. Ses amis lui manquaient atrocement. Et ils s’étaient tous promis, quand ils avaient quatorze quinze ans, de se retrouver dix ans plus tard, à Paris. C’était une promesse stupide mais un mail avait circulé et apparemment, tous venaient. Bref. Il ne sursauta pas quand la porte s’ouvrit et alla claquer contre le mur. Mais il fut quand même surpris.

_ JOHNATTAAAAAAAAAAAAAAAAAAAN ! VIENS UN PEU ICI QUE J’TE BOTTE LE DERRIIIIIIIIIIIERE !

_ Bonjour Aby. Que se passe-t-il ?

Il avait un petit sourire aux coins des lèvres mais ne leva pas la tête de sa feuille de rapport. D’une main, il remonta ses lunettes sur son nez, l’ignorant royalement. Après tout, elle n’en valait pas la peine. Il continuait d’écrire sereinement. Si elle voulait le frapper, à sa guise. Mais John aussi pouvait s’en donner à cœur joie.