A peine étaient-ils rentrés que, peu de temps après, un horrible vacarme retentissait dans toute l'institut. Le sol vibrait légèrement, le chandelier du Hall cliquetait dangereusement au-dessus de leur tête et c'est avec empressement que les deux jeunes hommes mal en point tentèrent tant bien que mal d'aller à la chambre de Fabian, où leur attendait de quoi se remplir leur estomac vide et re-vide. En plus du bruit sourd, le cri du vent frappait chaque mur extérieur et transperçait les tympans des résidents de Teenagers. Fabian céda à la panique un moment.

- C'est quoi c'b-bordel !?

Son mal aise avait été délaissé pour un sentiment de peur. Fabian n'avait jamais été dans ce coin de la Californie et n'était donc pas habitué à reconnaître les symptômes météorologiques d'une future tornade... Ainsi mit-il du temps à le comprendre, et quand il sut ce qui les attendait, ça n'arrangea pas pour autant sa crainte croissante. Par pur réflexe, il agrippa la main de Muriel et le tira sur les derniers mètres, lui criant de se dépêcher, à plusieurs reprises. Quand ils furent enfin dans la chambre, Fabian claquant la porte dans leurs dos, ils s'aperçurent que chaque fenêtre de la pièce avait été barricadée pendant leur absence par un moyen pré-installé. Ainsi, tout avait été déjà prévu pour parer à ce genre de problème... Est-ce une raison pour se rassurer ? Fabian hésita vraiment, et si la tornade était particulièrement violente cette fois ? Il n'avait pas grand chose pour comparer, voire rien. Ce n'était que sa deuxième tornade et l'autre était passée plutôt loin de chez lui.

Tout de même, malgré les battements de son cœur et la sueur froide perlant sur son minois aussi blanc qu'un linge, il fouilla une de ses petites valises qui n'avaient pas été encore beaucoup dérangée. Il en sortit fébrilement quelques paquets de biscuits, de chips, une bouteille d'eau et une de soda, trois sandwichs Club emballés, des bâtonnets de crabes avec mayonnaise à côté, un pain à moitié entamé avec un petit pot de chocolat à tartiner et deux autres de beurre de cacahuètes et de speculoos.

- Sers-toi, dit-il gentiment à l'adresse de Muriel.

Ensuite il s'assit, prit un sandwich jambon-fromage-salade, le déballa doucement, fit un boulette avec le plastique qu'il fourra dans sa poche - flemme d'aller jusqu'à la poubelle... - et mordit à pleine dents dans le pain croustillant. Il remercia alors Dieu en qui il ne croyait pas d'avoir peut-être inventé les sandwichs Club, surtout quand on a si faim.

-Toi aussi tu aimes les club sandwich jambon-fromage-salade?"

- Heuuu, fit la voix légèrement inquiète de Fabian. Oui, oui, j'aime bien ça, mais bon j'ai tellement faim que je mangerai du rat.

Un rire fade sortit de sa bouche couverte de petites miettes de pain croquant. Une miette tomba et de là, Fabian sut qu'il devait essuyer sa bouche. D'un revers de manche, il le fit, avant de prendre une deuxième bouchée qu'il avala quasiment sans mâcher. Une troisième, une quatrième, et c'est là qu'un bruit sinistre de craquement se fit entendre. Fabian sursauta, et le sandwich glissa sur ses genoux. Alors qu'il allait rouler jusqu'à terre, Fabi eut le réflexe de le rattraper à temps et arracha d'entre les deux tranches de pain français un morceau de jambon tartiné de mayonnaise qu'il fit sauter sur sa langue. Il essayait de rester calme, étonné de voir Muriel aussi serein ; il ne voulait pas perdre la face.

Sauf que juste après, un bruit ressemblant au précédent se refit entendre de l'extérieur, plus fort, plus inquiétant encore. Fabian frisonna.

- Tu n'as pas peur toi ? Demanda-t-il, ne cachant pas son étonnement.

Il replongea ses dents dans le pain.

- C'est une tornade n'est-ce pas ? C'est dangereux pourtant... t'as l'air de t'en foutre royalement...

Il parlait à nouveau mieux, quoique le sentiment de manque restait. Sa faiblesse se dissipait déjà grandement juste avec quelques bouchées qui calèrent sa faim, qu'il avait vraiment remarqué qu'en commençant à manger. Il continua à dévorer son sandwich dont il ne resta bientôt rien du tout...