Le flâneur nocturne est de retour, et plus affamé que jamais.

Ben oui tiens, il s'était réveillé là en pleine nuit, se rappelant subitement que "merde, j'ai oublié de manger aujourd'hui !". Son cerveau de poisson rouge amnésique l'oublie assez souvent d'ailleurs, 'manger' étant un besoin qui passe après 'boire-fumer-sniffer-coucher'. Certains se demandent comment il fait pour rester si mince, ben le secret est là : oublier de manger. Et il finit par s'en souvenir uniquement quand son estomac sonne l'armageddon, comme maintenant quoi. Ça l'empêche de dormir, donc 'faut y remédier. Il marche à son aise dans les couloirs endormis, silencieux, mais sans chercher à se cacher. Le junkie sait qu'à cette heure là, il a peu de chances de croiser un surveillant ici, la plupart sont sûrement déjà trop occupés à se taper un(e) pensionnaire pour faire leur boulot. Et même dans le cas contraire, il n'aura aucun mal à leur échapper, Nath' était le roi du sprint.

Ça fait plus d'un an qu'il est ici, il connait donc pas mal de trucs.

Bon, la cuisine, nous y voilà. Il ne fait rien de mal après tout, juste prendre son petit déjeuner, son déjeuner et son dîner qu'il n'avait pas prit la veille. Bon ok il prendra peut-être deux ou trois bouteilles d'alcool qui ne lui étaient pas destinées. Et quelques Pims aussi. Surtout des Pims en fait. À la framboise, de préférence. Miam.

Mais en s'approchant de la porte, il entend une voix féminine venant de sa salle aux trésors. Perplexe, il se rapproche, étonné de voir qu'il y a quelqu'un d'autre pour se prendre une collation d'une heure du matin. Une voix féminine, aucun doute là dessus, et cette voix chante. Bon, deux gourmands peuvent bien cohabiter le temps d'un soir, non ? Du moment qu'elle lui laisse des Pims...Le junkie pousse la porte, et une délicieuse odeur de chocolat lui donne une claque dans le pif. Purée. Depuis combien de temps n'avait-il pas sentit une pâtisserie en train d'être cuisinée ? Curieux, il regarde dans la pièce. Ola, la nana on dirait presque un mec de dos, et si c'est un mec avec une voix de nana ? Rien n'est impossible dans Teenagers. Hum, jolies jambes. Mais ce n'est pas ça qu'il est venu manger ce soir. Quoique.

En tout cas elle ne semble pas avoir remarqué sa présence. Le temps propice pour une petite blague. Il ferme la porte derrière lui, heureusement que cette dernière est bien huilée et que le chant de la demoiselle (?) couvre tous ses bruits. Il se rapproche d'elle à pas de loups, jusqu'à être derrière elle. En regardant par dessus son épaule, il voit un saladier remplit de chocolat. Hum. Déjà bonne à marier.

Bon, comment la surprendre, le junkie réfléchit, puis opte pour une façon simple mais qui a déjà fait ses preuves. Trop à l'ouest pour être original. Il inspire, et hurle d'un coup à son oreille :

"JE VEUX DES PIIIIIIIIMS !!!"

Discrétion zéro. Mais il s'en fout.

Il aurait pourtant été simple de deviner ce qui allait se passer ensuite, mais ceux qui connaissent Nath' savent que même les choses les plus évidentes lui échappent parfois. 'Faut le comprendre aussi, il vient de se réveiller, il a faim, et les rails de coke ne sont pas très bons pour la réflexion. Donc franchement. Comment aurait-il pu DEVINER que la fille allait renverser le saladier ? Le junkie évite le tout par un brusque écart, et contemple, avec un air consterné, tout ce bon chocolat gâché. Un silence perplexe règne dans la pièce, et Nath' réalise enfin qu'il a fait une bêtise. Et une grosse. Stupide. Et tout ça pour des Pims.

Oups.

Et en plus, il sent la demoiselle fulminer, comme un gros orage qui va lui tomber dessus. Et personne sur qui faire retomber la faute. Le junkie ne peut qu'aborder une expression d'enfant prit sur le fait. Il remarque aussi très bien la main rampant vers le rouleau à pâtisserie. Oulà non, on se calme là, j'mérite pas de me faire fracturer le crâne quand même. Vite, excuse toi imbécile, avant de prendre un coup qui détruirait ton charmant petit nez !

"Déso..."

Sploutch. Et voici la Vendetta. Qui n'a pas un goût de bois, mais de chocolat. Beaucoup mieux que ce qui était prévu, en somme, cependant, heureusement qu'il a eu le réflexe de réflexe de fermer les yeux, car il en a maintenant plein le visage, plein la peau, plein les vêtements. Il les réouvres, fixant son bourreau en train de lui grogner dessus, déconcerté. Quoi, c'est tout ? Tu me laisses en vie ?

"Hé, j'ai dis que j'étais désolé, alors n'insulte pas les divins pims."

Ben ouai, on ne rigole pas avec ces choses là. La fille lui tire la langue, ce qui lui confirme qu'il ne se fera tabasser ce soir. Une bonne chose. Du doigt, il prend un peu du chocolat qu'il a sur le visage, et le porte à sa bouche. Hum. Ce châtiment a très bon goût, ma foi. Dommage qu'il ait gâché le gâteau.

"Me faire pardonner ? Ben, si tu veux me punir en me balançant du chocolat dans la figure, j'suis pas contre."

Touchant, non ? On sent bien le désir de se repentir. Tout en continuant de suçoter son doigt enduit de chocolat, il regarde la jeune fille de la tête aux pieds. Appétissant tout ça. Il ne voit vraiment pas de quoi elle se plaint. Le junkie finit par hausser ses épaules.

"Tu t'en fous, y'a que toi et moi, puis les douches sont pas loin."

Moi je pourrais bien te l'enlever mais...*toussote*. Bon, mieux vaut garder ses idées stupides pour lui. Bon, tu vas quand même pas t'enfuir comme un voleur avec tes Pims, la laissant dans la m*rde quand même. T'es un gentleman, après tout.

"Tu veux que je t'aides à refaire un gâteau ?"

Là, comme ça on pourra pas le traiter de salaud.

Nathanaël ressent comme une drôle d'impression. Celle d'être la souris piégée par le chat. Et quel chat ! Ce dernier semble beaucoup s'amuser de la situation, se délectant par avance de ce qui va suivre. Cette suite, il la sent plutôt mal, parce que cette fille là suinte d'une désagréable folie. Non, elle n'est pas folle comme Nath'. Lui est plutôt foufou et casse-cou. Elle, ben elle, c'est...Carrément une folie malsaine. Du moins il en a l'impression, en la voyant glousser avec un air de psychopathe. Hum. C'était une mauvaise idée cette histoire de gâteau, et il aurait volontiers prit la fuite. Mais trop tard, le voilà déjà engagé - ça t'apprendras à parler sans réfléchir, crétin. Et avec des jambes longues comme celle de son interlocutrice, elle n'aurait peut-être aucun mal à le rattraper.

Donc mieux vaut rester ici, assumer ses actes et faire tranquillement ce gâteau, en espérant qu'il puisse repartir en un seul morceau. De toute façon, qu'est ce qu'elle pourrait bien te faire, hein ? Te frapper ? T'en as vu d'autres mon vieux. Le violer ? Oh mon dieu j'ai peur. Plus sérieusement ; il n'a pas de raisons d'avoir peur d'elle. Obéis lui pour lui faire plaisir, et ça s'arrêtera sûrement là. Ou pas. La demoiselle le juge en soulevant son menton, comme si elle avait affaire à une marchandise quelconque. Le junkie est un peu désappointé. Et puis c'est quoi, ce sourire carnassier ? Doit-il craindre quelque chose de sa part ? Finalement, elle se contente de lui 'ordonner' - c'est bien le mot - de refaire le gâteau, seul. Bon, ça doit pouvoir se faire sans effusions de sang. Quoique. Il n'en est plus tellement sûr en voyant cette horrible chose rose voler dans sa direction.

Du ROSE...! Seigneur petit Jésus !

Nathanaël considère l'oripeau avec dégoût. Non seulement c'est rose, mais c'est laid en plus, et ça pue tellement le renfermé qu'il ne serait pas étonné d'y découvrir une ou deux mites. Quelle horreur. Il n'est pas du genre à faire le fier, mais il y a des limites. Hors de question de lui faire porter un tutu sans l'obliger par exemple. Il en est de même pour ce tablier. Alors, veut-elle l'aider à le mettre ?

"Il faudra bien, parce que je n'enfilerai pas cette chose." grommelle t-il avec un air de dégoût en brandissant l'objet de toute les horreurs.

D'autant plus que ça ne servirait à rien, il est déjà couvert de chocolat, alors une tâche de plus, une de moins...Mais peut-être qu'elle ne veut pas lui faire enfiler ça pour qu'il reste propre. Juste pour se moquer de lui, peut-être. Raison de plus pour faire des revendications.

Apparemment, il a déjà oublié qu'il n'est pas en position de force.

Mignonne et fragile petite chose, en apparence du moins. Il est amusant de constater comment la jeune fille switchait entre deux caractères. Il y a deux minutes, le junkie avait cru qu'elle allait l'étrangler. Maintenant, elle joue les godiches, le traitant de méchant parce qu'il refuse d'enfiler un tablier horrible dont même un clochard ne voudrait pas. Trop gentille pour être honnête. C'est le genre de comportement qui inspire la méfiance ; elle doit être un peu fêlée, tout comme lui, tout comme 90% des résidents d'ailleurs. Mais est-elle vraiment dangereuse ? Il n'en est pas sûr, et c'est bien ça qui l'inquiète. En tant que prostitué, il discerne facilement les clients trop dangereux pour lui. Hésiter est d'autant plus troublant, même s'il n'y a pas de quoi fouetter un chat pour l'instant. Après tout, il n'a même pas encore prit de coups.

En tout cas, elle semble bien décidée à lui faire mettre ce foutu tablier. Le junkie a un mouvement de recul en la voyant s'approcher avec cet horrible truc, mais il ne peut pas aller bien loin, vu qu'elle se trouve entre lui et la porte. Grimace. La voilà toute proche de lui, leur différence de taille n'en est que plus flagrante. Elle pourrait faire mannequin, grande, fine et jolie comme elle est. Qu'est ce qu'elle peut bien foutre dans un endroit pareil, se demande t-il les yeux plongés dans les siens. Puis étonnement, elle semble hésiter au dernier moment et lui demande s'il n'allait pas la frapper. L'irlandais lève un sourcil ; l'idée de l'a même pas effleuré. Il n'a jamais violenté une femme - et rarement des hommes -, ce n'est donc pas aujourd'hui qu'il va commencer, surtout à cause d'un tablier.

"Non..." murmure t-il en guise de réponse.

Mais Abi lui avait déjà passé la guenille rose par-dessus la tête, c'est à se demander si elle avait vraiment eu peur de quoi que ce soit venant de sa part. Il se contente de soupirer d'exaspération devant l'humiliation qu'elle l'oblige à subir. Il la sent tout contre lui tandis qu'elle noue le vêtement dans son dos, et pour être franc, quelques idées pas très catholiques lui sont passées par l'esprit pendant ce court instant. A-HEM. Et c'est le rose aux joues qu'il supporte son regard moqueur. Il est décidément bien soumit aux caprices des femmes. Elle-même se prête au jeu en enfilant une toge. Bon au moins, il ne sera pas le seul ridicule dans la pièce. Mais alors qu'elle lance le signal de départ. La voilà qui bascule, et tombe avec fracas. Badaboum.

Oh mon Dieu, il manquait plus que ça. Peu désireux de faire la une des journaux avec pour sujet "meurtre en cuisine", le junkie se précipite vers elle pour voir ce qu'il en est - bon il s'inquiète pour elle aussi, 'faut pas croire. Il la voit se tortiller, morte de rire. Bon au moins elle est vivante, c'est déjà ça. N'essayant de ne pas trop attarder ses yeux sur les formes de la lingerie et des courbes de la demoiselle, il s'agenouille près d'elle pour l'aider.

"Arrête de gigoter ! Ça va, tu t'es fais mal ?" demande t-il, inquiet.

L'irlandais l'aide à se redresser un peu et passe sa mal dans ses cheveux et sur sa nuque, avec douceur et précautions. Il sent une petite bosse sur son crâne, mais il n'y a pas de sang. Ouf. Et le reste...?